Portrait de webwriter Chantal Girard

Il était une fois… un grand tiroir rempli de mots stockés pour devenir des histoires. Le temps a passé, l’oubli s’est installé, mais les mots n’ont pas oublié. Un jour, Chantal a entendu un chuchotement léger, mais persistant. Les mots s’agitaient et se sont rappelés à son souvenir. Pour toutes sortes de mauvaises bonnes raisons, elle hésitait à les laisser s’échapper, par crainte qu’ils ne lui appartiennent plus. La première envolée Instants de vie est un instantané du temps qui fuit. A peine prononcés, les mots disparaissent. A peine écrits, ils s’estompent. Toutes ces pépites éphémères n’en sont que plus précieuses.

La magie des mots a opéré et ils ont été libérés. Webwriter dès les premiers soubresauts de Webstory, Chantal Girard, a trempé sa plume dans la nuit pour secouer des étoiles entre les lignes. Une complicité quasi charnelle s’installe entre elle et les lettres. Ce sont des amies, des confidentes silencieuses qui ont pris leur liberté. Que disent-ils de Chantal ? Comme une enfant qui écrit à l’encre invisible, elle se révèle par touches en toute discrétion. Pour éviter de brûler le papier et laisser s’échapper les mots, il faut les caresser du regard. Relire, traîner en chemin, noter une expression, retenir son souffle. C’est un rythme à prendre. Dans l’encre et l’ancre, vous sentirez ce rythme lourd – léger, et vous débusquerez des mots invisibles. Comme une tache d’encre qui s’étend sur un papier buvard, « les mots, avec le temps s’effacent … les souvenirs s’estompent… les secrets perdent de leur importance, quelquefois même leur sens. »

Chantal livre une bataille contre l’oubli avec une arme puissante: l’écriture. Inlassablement, elle sème des lettres, des paysages, des personnages pour que rien ne se perde. Des racines terriennes et une enfance campagnarde constituent une source d’inspiration inépuisable. Des histoires comme La petite et Le char du marché détaillent des scènes de vie pleine d’humour, sa manière de faire remonter les émotions à travers la mémoire. Nous lui devons la catégorie Souvenirs d’enfance.

Parfois, le passé se rappelle à nous dans d’étranges circonstances. Nous nous sentons alors comme des figurines imbriquées les unes dans les autres à la manière des poupées russes. L’enfance ne disparaît jamais et c’est la plus petite qui sert de pilier aux suivantes. Ainsi lors d’un atelier d’écriture, Chantal fait l’expérience d’un voyage dans le temps pour retrouver Camo. Preuve, s’il-en-est, que les émotions traversent les années comme les mots, intactes. Ainsi, piégé par une odeur qui évoque votre enfance, en un instant un être cher ressuscite, disparu depuis longtemps Un coup de fil impossible.

Lorsqu’on vit tant d’années avec un cœur trop sensible qui… ne ferme pas à clé,… on laisse rentrer…– une foule de choses inutiles, qui, petit à petit, encombrent l’univers intérieur et assombrissent les idées
. Une description très juste de cette conteuse qui conjuge la densité émotionnelle du monde avec une légèreté et un humour dont elle ne se départi jamais. Occupée à faire le ménage de son appartement intérieur, elle nous raconte Une lettre, clé de son optimisme contagieux: »Même ce qui paraît trop beau peut être vrai. Même ce qui paraît trop improbable peut durer. Même ce qui paraît trop merveilleux peut se réaliser ».

Bonne vivante, voyageuse intemporelle, ses tranches de chemin de Compostelle sont parsemés de tentations et de rencontres gourmandes, sa façon de semer en toute simplicité Des étoiles en chemin  L’auberge de Saint Pantaléon.

Dans ce monde d’émotions, les paysages remplissent le rôle de personnages, et ceci dans tous ses textes.  Lisez Le temps… en poésie pour voir la ville de Genève comme un joyau mythique. André Birse, dans le commentaire en bas de page conseille de lire ces poèmes à voix haute pour entendre la voix danser.

Mais le temps file et j’aimerai terminer avec une allégorie du cycle de la vie. Depuis sa formation à sa transformation, un Nuage parcourt le ciel. Il s’élève, découvre le monde, se fait absorber par quelque chose de plus grand et retombe en averse sur de joyeux pélerins. La boucle est bouclée… Eternel recommencement.

Chantal Girard a emprisonné le temps dans un Sablier de mots qu’elle retourne à sa guise comme une tisseuse de contes. Quel bonheur qu’ils se soient échappés de son tiroir…