Créé le: 20.07.2012
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L’encre et l’ancre…

Poésie

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© 2012-2024 Chantal Girard

Les mots. Ils font partie de nos vies, sérieux ou drôles, graves ou pétillants ils traduisent fidèlement ce que l’on ressent. On les pense, on les dit, on  les lance, on les écrit, selon l’instant ! Aujourd’hui je vous les livre ; certains sont légers : ils sont nés d’une plume ! D’autres ont plus de poids : ils sont écrits à…    “l’ancre” !
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“L’encre”

Lorsque j’étais petite j’avais entendu dire qu’il existait de l’encre invisible.

Cela m’émerveillait :

Pouvoir écrire des mots et qu’on ne les voit pas !

Etait-ce possible ?

Je ne savais pas, mais si c’était vrai…

 

L’enfant que j’étais se disait :

″Si c’était vrai,

Pour les retenir

J’écrirais mes secrets

Sans que personne jamais

Ne puisse les lire…″

 

L’idée était tentante,

Mais je ne trouvais pas d’encre transparente.

Alors, sans ce discret confident,

J’ai tenté de garder tous mes secrets d’enfant.

Hélas, avec les années

Ils se sont envolés.

Plus tard, beaucoup plus tard,

J’ai appris qu’elle existait vraiment cette encre…

Sympathique !

Mais elle ne m’a jamais servie.

En grandissant j’avais compris

Que même lorsqu’on les trace

A l’encre bleue, mauve, verte ou noire,

Les mots, avec le temps s’effacent,

Ils s’évadent de nos mémoires.

Les souvenirs s’estompent aussi,

Petit à petit on oublie.

Les secrets perdent de leur importance

Quelquefois même leur sens.

La vie noue et dénoue des liens

Et les mots n’y peuvent rien…

Tout cela maintenant je le sais bien,

Mais puisque les mots sont là

Je vous les livre.

Certains sont légers : ils sont nés d’une plume !

D’autres ont plus de poids : ils sont écrits à ″l’ancre″…

 

“L’ancre”

Qui que l’on soit, d’où que l’on vienne, où que l’on aille, il y a toujours – dans les profondeurs de nos cœurs – une ancre qui nous rattache à quelque chose.

A un être, souvent

A un instant

A une habitude peut-être

A un élément parfois

Ou simplement à un endroit.

Insignifiantes ou essentielles, ce sont elles, toutes ces ancres jetées un jour,    qui nous retiennent sur l’océan de la vie.

 

L’ “ancre” transparente

Un prénom au bas d’une lettre

Retrouvée après des années

C’est un peu comme une fenêtre

Qui s’ouvrirait sur le passé

 

Aux frontières de l’oubli

L’esquisse d’un visage

Estompé par la vie

Transparaît sur la page

 

Minuscule radeau de papier

Retenu par l’encre des mots

Sur les vagues calligraphiées

Il oscille entre fond et flots

 

Lambeaux de souvenirs

Qui reviennent en surface

L’espace d’un sourire

Ou d’un regret fugace

Amitié, passion, feu de paille

Qui sait ? Le temps a englouti

L’histoire et seuls d’infimes détails

Revivent étrangement précis

 

Quelques réminiscences

D’un passé dépassé

Un instant d’existence

Que quelqu’un a signé

 

 

Le temps de tremper ma plume dans l’encrier et je poursuis…

Commentaires (4)

AP

Alain Pouteau
25.04.2023

C'est un très beau poème, puissant de simplicité. Les plus beaux poèmes, ceux que l'on peut dire à haute voix, sont simples... mais quel travail ! Il y a un mot pour décrire un si profond accord entre le fond et la forme : Classique. Ce poème est un classique et il aurait sa place dans une anthologie. Bravo Chantal et merci. Alain Pouteau.

Starben CASE
25.02.2022

Je redécouvre ce texte que j'aime beaucoup en histoire du jour. Pour répondre à Jean, comment ça marche... Peut-être que la mémoire est une composante de la machine à tuer le temps...

Jean Cérien
25.02.2022

Merci pour ce joli poème. Toute sympathique qu'elle soit, l'encre n'ancre pas vraiment nos souvenirs ; notre mémoire nous fait croire un temps que rien ne les effacera, puis elle passe à autre chose. Vouloir oublier ou vouloir se souvenir, comment ça marche ?

Daniel Bovigny
08.04.2020

Merci pour ce joli texte! C'est un vieux souvenir que je partage aussi. Bien ancré dans mon enfance et... fort sympathique! Sans vouloir casser le romantisme et la poésie de ce texte, voici comment cela fonctionnait: on prenait du citron à la place de l'encre et on écrivait un message invisible avec une plume à bec. Ensuite, celui qui recevait cette feuille blanche allumait une bougie et chauffait la feuille depuis le verso (sans y mettre le feu!!!). Ainsi, le texte noircissait plus vite que la feuille (effet chimique dû à l'acide) et le message apparaissait... Un petit exemple? Alors voilà: Il ne vous reste plus qu'à chauffer votre ordi derrière la partie vide ci-dessus et tous mes mots doux vous apparaîtront! Magique... (il faut bien laisser une part à votre imagination et aux phantasmes. Mais surtout n'essayez pas si vous voulez préserver votre PC...)

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