Jules-Etienne agite une petite cloche pour attirer l’attention. Quand tout le monde le regarde, il commence son discours:

— Merci à tous d’être venus. Je suis très heureux de pouvoir tous vous accueillir chez moi. J’ai une belle maison et une grande propriété, comme vous l’avez certainement remarqué.

Il fait une pause, histoire que chacun puisse bien visualiser ses richesses. Parce que, bien évidemment, la porte du garage ouverte n’était pas une coïncidence. Vous vous rappelez alors que vous avez toujours trouvé Jules-Etienne prétentieux.

— Et à quoi servirait tout ce luxe si je n’en profitais pas pour inviter les gens que je connais pour qu’ils en profitent à leur tour?

Plutôt pour qu’il puisse bien leur montrer à quel point il a réussi, corrigez-vous.

— Vous pourrez visiter le jardin plus tard, tout d’abord je vous propose de gagner le salon. Prenez vos verres.

— Et la piscine? s’exclame une voix que vous n’arrivez pas encore à identifier.

— Elle est toujours en pause hivernale. Il fait encore un peu frais pour se baigner.

Jules-Etienne marque à nouveau une pause étudiée pour laisser l’information circuler avant de poursuivre.

— Si vous voulez bien me suivre.

Vous passez par une immense baie vitrée et rentrez dans une pièce tellement grande que vous êtes à peu près certaine que l’intégralité de votre appartement tiendrait dedans. Jules-Etienne fait une présentation en bonne et due forme de son intérieur, donne le nom des artistes des tableaux accrochés aux murs, du designer des fauteuils qui encadrent une table basse, elle aussi conçue par un ponte de l’aménagement intérieur. Enfin, il s’arrête un moment pour détailler les références de l’auteur de la sculpture qui trône non loin de l’entrée.

Décidément, il aime étaler sa réussite. Vous trouvez ça pompeux, et vous n’êtes pas la seule. Votre voisin, Cédric qui aime toujours faire des blagues, vous glisse dans l’oreille «Et vous noterez le tapis en poils de baleine tressé à la main par un elfe unijambiste». Vous rigolez discrètement, Sabine qui est juste derrière vous, un peu moins.

Enfin Jules-Etienne se dirige vers la table de salon, si grande qu’une vingtaine de convives pourraient s’y installer sans se serrer.

«Et maintenant, déclare-t-il, place à la première activité récréative de la journée: la décoration des œufs. Je vous laisse prendre place autour de la table. Devant vous, vous trouverez quelques œufs durs et toutes sortes de décorations. N’hésitez pas à vous les échanger. Il y a également de la peinture, pour ceux qui n’ont pas peur de se tacher. Lâchez-vous! Et n’ayez pas peur, la nappe ne craint rien.»

— Vous adorez tout ce qui est artistique et l’idée vous réjouit. Vous lancez le mouvement en vous installant la première à table.

— Surprise, vous hésitez un moment. Vous regardez vos anciens camarades qui sont aussi indécis que vous. Mais l’un d’entre eux lance le mouvement et vous décidez de tenter l’expérience.

— Décorer des œufs? Vous n’avez pas dix ans! Vous n’avez pas du tout l’envie de vous prêter à ce genre d’exercice et prétextez un besoin urgent pour aller vous cacher aux toilettes.