Créé le: 02.01.2024
37 0 1
3 couleurs

Fantastique, Nouvelle

a a a

© 2024 Acinos

© 2024 Acinos

Imbolc

4

 Erine

 

Les premières perce-neiges ont pointées sous la couche de neige durcie.

Les rayons du soleil la font scintiller comme des milliers de minuscules diamants.

Le bleu azur du ciel immaculé annonce le retour des beaux jours.

Doucement, la nature se réveille et sa promesse d’un printemps vivifiant me remplit d’espoir.

Mes lunes se sont taries peu de temps après la naissance de ma petite-fille. Des signes que mon cycle s’amenuisait, étaient déjà présents depuis plusieurs lunes.

Ces vagues de chaleur qui me réveillent la nuit, trempée puis grelottante sous mes couvertures. Des douleurs dans mon ventre qui me serrent dans leurs griffes.

Je me suis rendue à l’évidence, je n’enfanterai plus. Ce temps est révolu pour moi.

Je pénètre lentement dans un espace temps totalement différent car plus rythmé par le cycle de la lune, une sorte d’éternité.

Cependant, je découvre qu’une nouvelle énergie m’habite. Ma vue est plus affutée qu’avant. Je ressens la présence de la Déesse bien plus fort et ma connexion à la terre se renforce.

Comme si le voile qui me sépare des secrets de notre Mère s’amincissait laissant apparaître son universelle sagesse.

Je la sens se déverser en moi par petites touches qui me donnent des fourmis dans les mains et dans les pieds. Les auras de mes compagnes apparaissent bien plus nets.

Durant mes consultations, je me sens plus sûre de moi et pour la plupart leurs soucis de santé s’améliorent rapidement.

Je me décide à parler avec Alana, ne pouvant plus supporter tous ces désagréments plus longtemps. Ma fille excelle dans la connaissance des plantes et de leurs préparations.

Grâce à ses conseils avisés, je jouis de mon nouvel état.

Mon acceptation grandit en même temps que les symptômes s’estompent.

Le manteau de la nuit recouvre encore le monde lorsqu’émue j’enfile la tunique de la Vieille, ce matin pour le rituel d’Imbolc, l’éveil de la vie, je n’incarnerai pas la Mère.

Ce rôle est maintenant dévolu à Alana.

 

Comme ma mère avant moi, je revêts le vêtement noire symbole du mystère qui entoure toute chose et de la sagesse qui l’accompagne. C’est dans l’obscurité que nous trouvons la lumière. Dans l’acceptation que tout est soumis à cet éternel cycle Vie, Mort, Vie.

Trois états dans la vie d’une femme, trois visages de la Déesse, trois couleurs…

Mes pieds s’enfoncent  dans la couche glacée qui recouvrent la neige en crissant. L’ascension de la colline demande une attention particulière, rendue glissante par la glace, je choisis précautionneusement l’emplacement de chacun de mes pas.

Le cercle de pierres sacrées brillent comme des centaines de miroirs reflétant les premières lueurs de l’aube.

La voûte céleste telle une aquarelle se pare de rose et d’orange. Ce spectacle lumineux est à couper le souffle et je reste un long moment à le contempler.

Mes soeurs se rassemblent formant un ruban lumineux au centre du cercle. Leurs flambeaux réchauffent peu à peu l’atmosphère.

Alana resplendit dans sa toute nouvelle tunique rouge, la vigueur et la force de la Mère l’habite, lui met du rouge aux joues.

La Vierge se tient à sa droite. Elle semble impressionnée par la présence palpable de la Déesse et écarquille les yeux émerveillée.

C’est également une première fois pour Coline qui vient d’être choisie pour incarner la Déesse blanche.

Je me souviens de ma peur de faire un faux pas lors de mon premier rituel et de la pression que je ressentais. Moi aussi, je me sui émerveillée de cette sensation envoutante que Sa présence me faisait vivre.

L’air du vent est entonné par Coline puis reprit par nous toutes. Sa voix chaude réveille la terre endormie par le froid de l’hiver. Elle fait remonter les tendres souvenirs de ma mère Kiera, grande prêtresse de l’air qui nous a quittées il y a peu.

Elle dépose son offrande, une petite lampe à huile, sur l’autel. Sa flamme tremblotante et vacillante, nous rappelle que la lumière ne nous quitte jamais.

Elle persiste bien que les ténèbres nous envahissent parfois.

 

C’est au tour de la Mère de faire résonner la voix de l’eau. Sa mélodie appelle l’eau à ruisseler afin que la terre puisse à nouveau se nourrir.

Un petit bol contenant l’eau de l’étang sacré est ajouté aux offrandes.

L’ai froid pénètre mes poumons lorsque j’inspire. La première note du chant de la terre s’élève et je la sens descendre jusqu’au coeur de la terre, chuchoter doucement que la dormance touche à sa fin. Ainsi la nature a entendu la voix de notre Mère lui demandant de se préparer pour le retour du printemps.

 

L’offrande que je dépose sur l’autel est une perce-neige tout juste éclose. Ses délicats pétales blancs nacrés tranchent sur le gris de la pierre. Elle semble si fragile et pourtant malgré le froid et la neige, elle fleurit en tapis par petits groupes comme l’esquisse d’une renaissance, une preuve d’endurance et de courage.

 

Un grand feu trône au milieu du village. Nous nous joignons aux festivités. Les femmes ont préparés des petites crêpes avec la farine précieusement gardée pour cette occasion.

Le repas bien que frugal est un régal. J’apprécie chaque bouchée après ces derniers jours de jeune.

Nous nous réchauffons les entrailles avec un peu d’hydromel, elle aussi conservée pour ce moment de partage.

Mon regard se pose sur chacun et chacune. Avec soulagement, je constate que tous sont en bonne santé malgré la rudesse de cet hiver. Je remercie la Déesse de nous avoir une fois encore épargnés pendant ces frimas éprouvants.

Je m’éloigne lentement marchant dans les empreintes fraîches laissées par mes soeurs.

Entre mes seins, je sens la chaleur de la petite bourse de cuir que ma mère m’a remise à Samhain. Je ne suis pas encore tout à fait prête à l’ouvrir. Cela me suffit de contempler en songe la porte qui mène à ma lignée.

Lire le chapitre suivant

Commentaires (0)

Cette histoire ne comporte aucun commentaire.

Laisser un commentaire

Vous devez vous connecter pour laisser un commentaire