Créé le: 25.08.2024
33 0 1
Parler entre nous

Nouvelle, Poème en prose

a a a

© 2024 André Birse

J'ai avec la qualité de l'échange dans nos conversations, autant qu'avec mon propre jeu, un problème récurrent. Essayons pas écrit.
Reprendre la lecture

Il regardait la montagne dominante et acceptait qu’elle fut son horizon. Les mots venaient du transistor. Il les accueillait. Enfant, je les gardais pour plus tard et m’évertue encore à ne pas les laisser filer. Le cœur serait léger et nous parlerions. Je me ferais ton interlocuteur. Toi de même à mon endroit. Choses graves, « mais parlons d’autre chose ». On pourrait se lancer, oser, se sentir libre sachant que toute parole a une valeur. Toute parole ? Bonnes ou mauvaises pensées qui défilent dans le langage et faire attention à ce que l’on dit. J’ai repassé la bobine des propos de toute une vie et nécessairement me trouve bête ici et là arrogant. Alors je laisse mon actuel silence poser les bonnes questions. L’écriture m’aide à me taire et peut-être davantage.

 

Il y a bien sûr ce que je dis que vient absorber ce que j’entends. Sur tous les sujets, l’interviewer se voit poser une limite, feignant de croire qu’il lui revient de la respecter. Les mots n’auront pas tant que cela comptés, ceux qui étaient censées être d’amour, à l’exception toutefois des autres prononcés pour permettre un apaisement. Merci à toi. Les mots de combat de cette jeune maman ou les mots de comptoir de ce fier amant. Graver sur l’or ses soucis narcissiques, verbe de l’égo à profusion ou se voir infliger par l’autre ses miroitantes certitudes. Le discours présidentiel destiné à on ne sait quelles fins. Propos de fatigue ou pour fuir un casse-pied. Les candidats outre-Atlantique dans une autre langue qui permet plus encore l’écrasement jusqu’à nous revenu. L’inimitié est un langage. On ne corrige pas ses notes, verba volens, ni ne pourrons les mettre à jour. C’est fait, c’est dit, et l’on n’y repense après.

 

Souvenir lointains de choses dites qui auraient pu l’être autrement. Les mots heureux ont disparu dans une sorte de physique enchantement. Il m’arrive de vouloir dire n’importe quoi, par défi, pour tester la véritable attention du réel. Je me suis retenu la plupart du temps et remercie certains de mes interlocuteurs d’en avoir fait autant. A d’autres occasions, soliloquant, il me semble que ce que j’ai à dire, ou à entendre du passant taiseux, est important, comme si la parole contenait un semblant de vérité, alors qu’elle n’est que le son de l’humaine considération sur à peu près tout ce qui ne comptera pas. Je ne peux pas dire ça, on n’a pas besoin de mes mots pour juger. Après la sentence vient le silence. Il faut se dire que si l’on n’a plus rien à dire ça ne veut rien dire. C’est dur d’entendre ça. Mais tant qu’un discours résonne au fond de soi, le sien même à d’autres repris, un doux mélange qui accompagne les vivants et persiste au-delà de l’existence sans pouvoir à lui seul la renouveler.

 

 

Les faux débats à la télévision ou demain soir au restaurant. La ferveur dans une tasse de thé et l’énervement pour diapason. Prendre le dessus pour être admirable et se mirer dans une collective et suffisante immédiateté. Il me reste quelques mots comme à l’école les billes. Une petite vertu langagière, un accompagnement lexical, qui implique qu’on y revienne, lecture, expression et que l’on entende ceux prononcés, il y a longtemps, du temps de la jeunesse de nos grands-parents. Le mot permet un adoucissement, il saura se faire plus fort que la violence et traverser les espace-temps. J’en sais quelque chose étant à la fin et au commencement, à hue et à dia dans une éternité lexicale qui ne devrait plus tromper. Rester sans rien dire eût causé une autre souffrance. Il importait d’adopter le langage, d’accepter ce don, de le considérer comme tel. Une aide ontologique peut-être, tout simplement

Commentaires (0)

Cette histoire ne comporte aucun commentaire.

Laisser un commentaire

Vous devez vous connecter pour laisser un commentaire