Créé le: 12.08.2024
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L’étoile
Chapitre 1
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J’ai été une fois une étoile. Oui, je sais, les histoires commencent d’habitude avec « Il était une fois… », mais celle-ci n’est pas une histoire quelconque, celle-ci est mon histoire.
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J’ai été une fois une étoile. Oui, je sais, les histoires commencent d’habitude avec « Il était une fois… », mais celle-ci n’est pas une histoire quelconque, celle-ci est mon histoire.
Comment pourrais-je t’expliquer la vie d’une étoile?…en fait, elle ne vit pas, elle est ; elle ne flotte pas quelque part dans l’Univers, elle est l’Univers ; elle ne ressent ni paix, ni sérénité, elle est la paix. Quand tu regardes depuis la Terre un ciel étoilé d’été, tu penses qu’il est merveilleusement beau, mais tu ne peux pas savoir qu’il est infiniment plus majestueux que tu ne serais jamais capable de l’imaginer. J’avais ma place parmi les étoiles du ciel. Je n’étais ni la plus grande, ni la plus brillante, mais ceci n’a pas d’importance pour une étoile. Mes sœurs, je les sentais toutes…pas avec des sens, car je n’en avais pas, mais comme si elles étaient toutes moi-même. Les distances physiques entre nous ne nous empêchaient pas de communiquer, car nous étions une et même chose. Les distances servent, en fait, à couvrir l’entité infinie de l’espace avec notre énergie. Nous ne sommes pas éternelles sous l’aspect physique, mais notre énergie ne meurt jamais. Elle se transforme pour couvrir l’entité temps depuis toujours et pour toujours.
C’est ça que nous sommes : une accumulation d’énergie pure qui a trouvé un grain de poussière céleste pour s’y accrocher. L’énergie pure est le plus grand et le plus puissant trésor de l’univers, l’essence de toutes choses, le principe dont Dieu est fait. Sur Terre vous l’appelez : l’Amour. Dans l’Univers on ne l’appelle pas : il est…ce qui nous fait exister, ce qui nous relie au-delà de matière, temps et espace.
Je partage avec toi des secrets dont peu de personnes sur la Terre ont connaissance, mais qui pour nous, les étoiles, sont des évidences. Le plus important : l’Amour ne se perd jamais. L’amour silencieux, l’amour donné gratuitement, l’amour non partagé, l’amour-prière, l’amour-pensée, l’amour-sourire, l’amour pour la Terre entière, aucune forme d’Amour ne se perd. Il flotte pendant une période, léger comme une brume, puis il se lève vers le ciel, il trouve un support pour s’y accrocher et devient une étoile. Vous, les humains, vous êtes des créateurs d’étoiles. La seule condition : que ce soit un Amour pur. Souvent il se confond avec la possession ou l’égoïsme, mais c’est que les humains qui font la confusion. Comment faut-il faire pour ne pas se tromper ? L’Amour pur ne demande jamais rien. Les substituts d’Amour, par contre, créent d’autres choses : ils créent des espaces…des espaces entre vous; des espaces entre nous, les étoiles, et vous, les humains.
Je ne devrais pas te révéler tout cela, tu devrais découvrir toi-même ces vérités, pour qu’elles résonnent mieux en toi. Mais comme je ne peux pas attendre, comme j’ai besoin que tu me comprennes, je t’en parlerai encore…et ton âme comprendra à ta place.
Je vais te parler des bébés : ils ont en amour la charge d’une étoile entière. Ils sont envoyés sur Terre pour vous aimer, et ceci déjà dans le ventre de leur mère. As-tu déjà regardé dans les yeux d’un nouveau-né ? Tu peux y voir l’Univers tout entier. Mais leur flamme s’éteint vite. Comme toute chose pure et fragile, leur Amour, s’il n’est pas entretenu, cultivé, chéri… il s’évapore et laisse place à la colère et au désespoir.
Les mamans le savent tellement bien : au début de leur grossesse, c’est comme un ouragan qui se déchaine dans leur corps, une explosion qui bouleverse tout leur être. Elles ont besoin de temps pour comprendre, il leur faut du courage et beaucoup de patience, mais ce bouleversement leur ouvre un canal vers l’Amour parfait qui va les guider pour le reste de leur existence. L’effet contraire va de soi : quand le petit être à effet dévastateur d’Amour n’est pas reçu, il est perdu, ou arraché du corps qui l’a accueilli, les mères ressentent un manque énorme, irréparable, un vide de la taille d’une étoile.
A moi, ce qui me manque le plus de l’état d’étoile c’est le silence. Un silence total, profond, irréel, sacré. Comme j’aime ce mot ! Vous, les humains, vous l’utilisez pour tout ce qui dépasse la capacité de perception de vos sens et celle de compréhension de votre intelligence. C’est un silence sacré, donc, reposant, un silence qui permet de se ressentir entre astres, de se sentir reliés à l’Amour qui nous a créés. Un silence qui, une nuit, m’a permis d’entendre un cri. Ce cri venait de la Terre.
Je lui ai prêté attention et j’ai pris conscience d’une douleur atroce. Ce n’est pas à l’intérieur de moi que j’ai pu la ressentir, car je suis faite d’énergie pure, mais c’était comme une vibration qui perturbe l’équilibre parfait de l’Univers. Et voilà, un autre secret que je ne peux pas m’empêcher de te révéler : toute souffrance, toute offense, tout ce qui dévie de l’Amour pur perturbe l’équilibre de tout l’Univers. Car tout ce qui existe est fait pour être en harmonie. Tout ce qui existe dans le monde matériel, spirituel et au-delà est guidé par la loi de l’équilibre…sauf pour l’homme, qui a accepté d’avoir le choix.
La vibration m’a conduite à une chambre d’hôpital. Il faisait nuit sur la Terre. Dans la chambre il y avait un lit, une chaise et des appareils qui clignotaient et vrombissaient sans relâche. Dans le lit, un petit être relié aux appareils. A côté de son enfant malade, la mère pleurait son désespoir, son impuissance. Ce n’était pas la première fois que je rencontrais une scène pareille. II y avait pourtant ici quelque chose qui n’était pas ordinaire, qui m’attirait et me perturbait…et je crois que cette fois il ne s’agissait pas d’une vibration externe. L’enfant n’avait pas plus de 8 ou 9 ans, son corps était petit, maigre et affaibli par la maladie, mais son âme était grande et lumineuse, d’une lumière claire et douce qui montrait qu’elle était en paix. La souffrance ne lui avait pas altéré la beauté, la splendeur. Cette âme m’appelait. C’est elle qui a attiré mon attention, c’est elle qui m’a fait entendre le cri de la mère.
La mère était assise à côté, sur une chaise en bois, la tête s’appuyant contre le mur, le visage illuminé par la lumière satinée des étoiles. Ses yeux étaient gonflés des larmes. Le désespoir ne pouvait pas avoir un autre visage. Son âme avait une couleur changeante : vert et rose pale, d’une lumière étouffée, avec un grand trou noir juste au milieu. Le détail me troublait. Pourtant je n’aurais pas dû être troublée, j’étais une étoile. J’ai compris que le cri était celui d’une âme à qui manquait une partie. Ce n’est pas l’enfant qui avait besoin d’aide…mais sa maman. L’âme de l’enfant savait et elle a attendu une nuit étoilée pour m’appeler.
J’ai questionné à l’Univers et mes sœurs, les étoiles, m’ont répondu. J’ai senti Dieu sourire et je n’ai eu aucun doute. Je l’ai voulu, et ma descente vers la Terre a commencé. J’ai perdu beaucoup d’énergie, mais je savais qu’elle n’était pas réellement perdue. La vitesse était vertigineuse. Je voyais défiler les autres étoiles, les planètes. J’entendais leur murmure comme un applaudissement céleste. Je voyais comme mon passage les remplissait de nouvelles énergies. Moi, je m’affaiblissais de plus en plus. Au moment où je me demandais comment allait se passer mon entrée dans l’atmosphère terrestre, j’ai été aspirée. Plus rien, du noir, du vide pendant quelques instants, ensuite une sensation infernale, insupportable, atroce, que je n’imaginais pas pouvoir exister. C’est ce que vous appelez : la douleur. L’énergie de l’Amour pur plongé dans un puits de souffrance.
La douleur s’est diversifiée, elle est devenue regret, méfiance, manque de confiance, abandon, colère, ennui, désespoir, impuissance…mais surtout peur, une peur immense qui paralysait tout mon être. C’est ainsi que je me suis rendu compte que je pouvais sentir. Pas des ondes, pas des vibrations extérieures, mais au plus profond de moi. L’émerveillement a remplacé la peur. J’étais étonnée par chaque nouvelle sensation, par la diversité des sentiments, par leur profondeur…et l’Amour ? Si j’avais acquis la capacité d’avoir des sentiments, je devais pouvoir sentir l’Amour. Pour la première fois, je l’ai ressenti dans toute sa splendeur : moi, faite d’Amour, j’ai pu reconnaître mon essence et la vivre pleinement pour une seconde, une seconde longue comme une éternité.
C’est à ce moment que je t’ai vu : couché à côté de moi, des yeux énormes sur le visage fin, trop fin et trop pâle pour ne pas trahir la souffrance que tu endurais. Tes yeux me fixaient et je savais que ton âme savait. Je commençais à percevoir que j’aivais trouvé ma place, que j’étais là où je devais être, quand une force, d’une brutalité inouïe, m’a attrapée pour m’arracher à cette vie que je venais de commencer. J’étais tirée, aspirée, décrochée, disjonctée. Il faisait froid et la douleur m’envahissait à nouveau avec une intensité déchirante. J’avais l’impression de revivre un mauvais souvenir.
Ce sont tes yeux qui m’ont retenue. Tes grands yeux bleus, avec des cernes profondes. Je me suis accrochée à eux, les yeux d’une âme grande et pure qui m’appelait, une nuit étoilée, pour réparer l’âme abimée de la mère, notre mère. Il faudrait une énergie de la taille de plusieurs galaxies pour réparer toutes les âmes perdues, fanées, dévastées sur la Terre. Cette énergie existe, car l’Univers est fait d’Amour. Il faut seulement des yeux qui se lèvent et qui appellent, des yeux insistants qui savent qu’il y a toujours une réponse.
J’ai été une fois une étoile, de l’énergie pure accrochée à un grain de poussière céleste. Les yeux dans les yeux, je t’ai raconté mon histoire. Je vais communier avec l’âme qui m’a accueillie. Je vais m’oublier, pour qu’elle puisse vivre et partager l’Amour pur, l’Amour universel. A travers elle je vais t’aimer, à travers elle je vais te protéger. Nous allons être finalement une famille.
Epilogue : C’est ce que l’étoile m’a raconté une nuit, à travers les yeux de ma mère. Peut-être ce n’était qu’un rêve, ou des hallucinations causées par la maladie. Je ne sais pas vraiment. Tout ce que je sais c’est que, à partir de cette nuit, les yeux de ma mère n’ont plus étaient rougis par des larmes, mais illuminés par des étoiles. Elle me sourit maintenant, elle me dit que tout ira bien, que tout est déjà bien. Je remercie Dieu pour ma maladie, car grâce à elle ma maman va mieux. Et moi aussi je vais beaucoup mieux. Dès que j’ai eu la force de me lever, j’ai demandé du papier et un crayon et j’ai commencé à écrire l’histoire de l’étoile. Cela m’a pris du temps, plusieurs mois. J’aurais voulu écrire plus vite, mais j’ai dû m’arrêter souvent pour me reposer. Je n’ai pas tout compris, mais les mots étaient très précis dans ma tête, comme s’ils étaient imprimés là. Ma maman a lu l’histoire en premier. Elle a beaucoup pleuré, comme elle ne l’avait pas fait depuis longtemps. Elle a corrigé mes fautes d’orthographe (j’en fais encore beaucoup) et quelques phrases maladroites. J’aurais voulu lui demander si je ne devais pas avoir eu un frère ou une sœur, mais je n’ai pas eu le courage. D’après ses larmes, je crois que c’est plutôt vrai. Elle me racontera peut-être un jour… Demain j’aurai 10 ans.
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