Créé le: 02.07.2020
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Vague à l’âme

Poésie

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© 2020-2025 a Chantal Girard

Vivre l'instant

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Deux trois mots sous ma plume Des impressions de femmes Rien d'autre que l'écume De quelques vagues à l'âme...
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VIVRE L’ INSTANT

 

Surtout ne pas penser

Ni à demain, ni au passé

Vivre l’instant

Comme si c’était le premier

Comme si c’était le dernier

Vivre l’instant seulement

Et puis recommencer

Inlassablement

D’instant en instant

 

Surtout ne pas penser

Ne pas se retourner

Ligoter les souvenirs

Pour ne pas souffrir

Tenir son cœur en laisse

Pour qu’il marche au pas

Lui mettre une muselière

Afin qu’il ne crie pas

Lui poser des œillères

Pour qu’il ne s’égare pas

Et puis avancer

Sans rien dire

Sans rien voir

Sans espoir

Sans penser

Avancer seulement

Inlassablement

D’instant en instant

 

Eviter de croire

Faire taire les projets

Ignorer les « si« …

Si… ils se présentent

N’avoir pour seule éventualité

Que « peut-être »

Et encore

Peut-être pas…

 

Surtout ne pas penser

Ne pas se retourner

Avancer simplement

S’accrocher à l’instant

Comme si c’était le premier

Comme si c’était le dernier

Vivre en raccourci

Vivre… jusqu’à l’oubli

 

 

 

 

Fantôme

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Fantôme

 

J’ai peur de ce fantôme

qui porte nom de femme

Et dont l’essence embaume

Encore un peu ton âme

 

Profond comme un soupir

Léger comme un frisson

Plus fort qu’un souvenir

Il hante ta raison

 

Sous les cendres apparentes

La braise couve encore

Ne dis pas que j’invente

Ne dis pas que j’ai tord

 

Je vois bien que parfois

Pour un mot, pour un geste

Qu’elle savait mieux que moi

Soudain tu me détestes

 

J’ai peur de m’enliser

Dans quelques illusions

S’il me venait l’idée

De t’aimer pour de bon

 

Tu joues l’indifférence

Mais tu ne pense qu’à elle

Chacun de tes silences

Toujours me la rappelle

 

A travers mon regard

Tu cherches sa présence

Des fois que le hasard

Ait mis des ressemblances…

 

J’ai peur de ce fantôme

Qui porte nom de femme

Et dont l’essence embaume

Encore un peu ton âme…

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La complainte de Pierrot

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La complainte de Pierrot

 

Si mes lèvres savaient rendre plus beaux les mots

Comme le faisait, pour Roxane, Cyrano

Je réinventerais l’amour juste pour elle

Si j’avais le talent des poètes immortels

Je mettrais mes espoirs en quelqu’ alexandrins

Et si j’avais les teintes vivantes d’Arlequin

J’enchanterais, c’est sûr, le cœur de Colombine.

Hélas je n’ai rien qu’un masque de farine,

Un costume bien trop grand qui fait sourire en coin

Tous ceux qui, au grand jour, me croisent en chemin.

Je n’ai ni le talent, ni l’allure, ni les mots

Qui enchantent et séduisent, je ne suis qu’un Pierrot…

 

Qu’un Pierrot, rien de plus, pourtant je suis plus riche

Que les princes et les rois malgré mon air godiche.

Ma fortune est immense, mais je ne crains pour elle

Ni voleurs, ni brigands : qu’ils prennent mon escarcelle !

Il n’y trouveront guère de pistoles ou d’écus

Dedans, depuis longtemps, l’argent ne s’y plaît plus.

Ce n’est pas à l’abri que sommeille ma fortune

Mais au cœur de la nuit sous un rayon de lune…

Posée en équilibre entre soir et matin

Elle est là, scintillante, dans le plus bel écrin

Faite de météores, d’étoiles et de comètes

Je n’ai pour la compter qu’à relever la tête.

 

Et moi Pierrot je rêve que du ciel je décroche

Une étoile, la plus belle, et la mets dans ma poche,

Illuminant ainsi mon habit tout entier

Elle semble le tisser d’un fil d’éternité.

Ce fragment de lumière enfouit dans mon costume

Efface de mon cœur chagrin et amertume

Heureux comme un enfant insouciant et rêveur

Je tiens entre mes doigts l’ébauche d’un bonheur

Qui saura enchanter le cœur de Colombine.

Mais en chemin la nuit tout doucement décline

Et l’étoile que j’avais retenue prisonnière

S’éteint avec le jour ne laissant que poussière…

 

 

 

 

Envol

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Tu ris, je pleure

Tu dors, je danse…

Qui sait de quelles couleurs

Seront les joies de notre enfance…

 

Lorsque nous seront si loin d’elle

Lorsque nos ailes, si belles,

Aux jours de nos « avant »

Abîmées par le temps

Jamais plus ne voleront

Qu’au cœur de nos souvenirs

Jamais plus ne battront

Qu’au rythme de nos soupirs ?

 

Je ris, tu pleures

Je dors, tu danses…

Dis-moi de quelles couleurs

Seront les joies de notre enfance…

 

Lorsque les sons, si purs

Ne nous atteindront plus

Lorsque les fruits, trop mûrs

Ne nous raviront plus

Au bout du « conte » lorsque le temps

Aura entériné

D’une griffe les sillons de nos ans

Et de nos champs fanés ?

 

Tu pars, j’ai peur

Je pleure, tu ris…

Sais-tu de quelle couleur

Sera ton infini ?

 

Rien ne t’atteindra plus

Lorsque j’aurai vieilli

Le temps n’a pas voulu

T’accorder de sursis…

Tu minimises, tu me rassures

De paroles essentielles

Ta flamme s’éteint, je me fissure

Loin de moi déjà tu t’encielles

 

Tu voles, j’ai peur

Je vis, tu meurs…

Commentaires (3)

Naëlle Markham
02.07.2020

Bonsoir et bravo Chantal pour ces textes superbes, Mon vécu fait que je craque plutôt pour "Vivre l'instant", j'assume. Il y a comme cela des résonances entre les êtres, entre les mots, entre les silences, qui vous laissent entrapercevoir à quel point chaque être humain est à la fois unique et universel tant dans sa joie que dans sa douleur. Un lecteur ou l'autre, en lisant ce poème, y verra peut-être du pessimisme. L'indécrottable optimiste que je suis y voit la vie, et sa force qui ne rend jamais les armes. On appelle ça la résilience ... Loin, très loin de l'abattement et de l'abandon.

Alice Leloup
02.07.2020

Quant à moi, ce sont surtout Fantôme et Vivre l'instant qui m'ont touchée. Tristement beau, à faire revenir nos propres fantômes. Merci pour ces vers.

GR

Ghislaine BROCARD GONIN
14.06.2020

Trois beaux poèmes, merci Chantal ... j'ai cepedant un petit faible pour " La complainte de Pierrot " pleine de romantisme et de sensibilité ...

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