Créé le: 06.04.2015
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T’emballe pas

Nouvelle

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© 2015-2024 André Birse

Je m’égare. Prose poétique. Voulue telle, déraisonnablement. Jusqu’où m’emballerai-je ? Je ne le sais pas.Ce texte devient une sorte de journal spontané parfois prose, parfois prose poétique. J’apprécie l’exercice. Libérateur. Journal  d’un mois d’avril (2015) sous forme de poème en prose. 
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T’emballe pas

 

 

L’écriture nous réserve des surprises. Elle nous prend au mot. Je dois admettre que j’apprécie de plus en plus répondre à ses propositions secrètes et intérieures de rendez-vous. Irai-je jusqu’à observer que l’écriture est une réjouissance ? La réjouissance ne peut être individuelle, si l’on se réfère strictement à la définition de ce mot à laquelle il est préférable de se conformer. Pour que l’écriture soit réjouissance, il faut plusieurs lecteurs au moment même où l’auteur crée son texte. Mais ça ne va pas. Nous sommes d’accord avec cela, ensemble et sur l’instant. Au temps même de l’immédiateté informatique, l’écriture demeure un privilège de l’individu seul avec sa réalité intérieure; et toutes les réalités, au reste, telles qu’il les perçoit par lui-même au moyen des mots empruntés à d’autres intériorités entrées en réjouissance langagière. Mais là je m’emballe. Je m’égare. C’est le risque de l’écriture, l’égarement, qui est un risque dans la vie aussi.

 

Qui ne s’égare pas ? Je vous le demande, par écrit. Tout ce qu’on ne fait pas pour se préserver de l’égarement. A l’égard des autres. A l’égard de soi. Rester tranquille ou faire le fou. Comme certaines règles de grammaire, l’un et l’autre vont. Rester totalement tranquille ou faire absolument le fou. Là, je sais que j’écris, mais le reste, je ne le sais pas. Je peux faire le fou à force d’être tranquille. Il n’y a pas de grammaire de l’esprit. Nous le voyons bien, en nous. Il existe un dictionnaire pour décrire ceux qui s’égarent intranquillement. On dit qu’ils ont perdu l’esprit et leur façon de perdre l’esprit est décrite dans un grand manuel venu d’Amérique et admis en Europe, le DSM dans son abréviation anglaise ou CIM pour l’adaptation française. Il y a là une classification des désordres mentaux. Un rappel des souffrances. C’est vaste et précis comme le possible dans toute vie. Personne n’est à sept lieux de perdre l’esprit. Tous voisins, tous cousins. C’est une autre approche de la fraternité. L’expérience est à faire. Dans un dialogue, vous osez : « à vrai dire il y a un peu de folie en chacun de nous, ne trouvez-vous pas ? ». Une personne raisonnable vous répondra oui. Parce qu’elle est raisonnable et qu’elle sait sa raison vulnérable. Nous sommes lucides intimement sur ces questions-là.

 

Ceux qui ne le sont pas ont droit à un chapitre dans le DSM. Incognito et sans frais, la plupart du temps. Cette lucidité, il y a de quoi s’en réjouir. Tiens la réjouissance (substantif) convient au groupe seulement mais se réjouir (verbe) convient aussi à la personne seule. Intéressant. Oui, il y a de quoi se réjouir, seul ou en groupe, car un peu de lucidité nous permet d’organiser notre sort, d’être là et de voir venir. C’est bien ce dont il s’agit, être là et voir venir en se réjouissant. Certains ne le font pas. Ils ne sont pas là. Refusent de voir venir ou de s’en réjouir. Je les comprends. C’est leur lucidité à eux. Les limites de la fraternité, du voisinage ou de la familiarité, d’âme et de comportement.

 

« T’emballe pas » me disait récemment un ami à qui je présentais comme réalisables certaines folies. Il me rappelait à la lucidité de façon amusée et ferme. Mais je ne m’emballe pas, sauf parfois dans ma prose. En poésie c’est permis, c’est requis. Mais en prose raisonnable, attention. A dire vrai, il n’y a pas de quoi s’emballer. Juste, c’est ça, juste de quoi vivre avec en soi un mélange de courage, de lucidité et de sérénité. Pour le reste, c’est l’avenir avec ce qu’il porte en lui de présence du passé. Ces temps composés, cette grammaire, ces vues de l’esprit qui ne se suffit pas à lui-même mais se réjouit quand même. Je me suis encore égaré. Je m’égare sans cesse en écrivant. Mais je reviendrai. A moi. Pas seulement.

 

A un moment de la vie, nous acceptons son imperfection et la nôtre, sa finitude, la tienne et la mienne, et nous poursuivons comme si nous n’avions pas accepté ni compris. Est-ce un talent ? Une vertu ? Cette quiétude est interrompue par les soubresauts de la réalité qui s’agace parfois de la persistance de ses ciels purs. Nous acceptons, après avoir accusé le choc, pris un coup, été happés par une émotion. Nous continuons. Le soleil se cache, le ciel se couvre, l’ombre se glisse. Le printemps reviendra. C’est animé en nous. A l’extérieur aussi ça bouge. Les montagnes ont bougé. Elles bougent encore. Imperceptiblement, la terre a tremblé. Nous sommes là. Certains se fatiguent, d’autres désespèrent. C’est dur pour tout le monde, inégalement. Il y aurait de quoi être à plat. Nous repartons. La démence fait des ravages, nous le savons. Nous persistons. Devant nous. On parle du lien social sans même mentionner le lien existentiel qui est pourtant bien là. Vivant. Toujours vivant. Les tarifs ne sont pas les mêmes, les sorts sont différents, et nous poursuivons, dans l’attente du recommencement. Rien de mystique là-dedans. Une simple constatation de routine.

 

L’effroi en poésie, en psychologie, est un état extrême de stupeur et de surprise auquel nous échappons généralement. N’est-elle pas insondable cette lucidité qui nous fait persister ? C’est l’instinct, de vie et de toutes les autres choses à l’intérieur et au-delà de celle-ci. Il faut rappeler quelqu’un, prendre sa voiture, ne pas trop s’isoler. Il est préférable de faire de l’exercice et bien manger en tenant compte de l’évolution importante du sens du mot, ” bien”, au cours des ans. C’est un mot boomerang, un mot kangourou, une ellipse, une éclipse. Le mot bien est une expression souvent entendue qui a perdu de sa force et qui bouge plus vite que les montagnes à “bien” y regarder. Parfait est plus à la mode, il se rapporte à l’individu. Solide, stable, enjoué, beau, sont dans le coup. Au milieu de l’écran. C’est un fait important désormais, le milieu de l’écran depuis l’instauration des nouvelles techniques de cadrage. Ça se fait tout seul. Elle est parfaite au centre de l’écran et tout est dit. Nous sommes présentables et performants. Nous aimons cela. C’est comme cela que nous nous aimons. Tout le monde peut y arriver. Vous verrez.

 

C’est, comment dire ? Beaucoup plus que bien qui n’est plus suffisant. La suffisance aussi s’apprend avec le temps dans la multiplicité de ses variations. Elle a ceci d’avantageux qu’elle exclut l’approximation qui est sœur de l’hésitation. Et des hésitations je n’en ai plus. C’est ainsi que j’écris, que je vous écris. Je n’hésite plus à le faire. J’ai fait une déclaration d’amour à l’imperfection, je l’ai aimée tellement que je m’en suis réjouis. Ce grain de folie ? C’est ma nouvelle lucidité, passagère. Je cherche de la poésie dans la prose et du réel dans la vie.

 

Aujourd’hui, en France, constatant le décès de l’un des accusés qui s’est donné la mort, le Président a renvoyé l’audience pour cause « de circonstances insurmontables ». Il n’a pas fait de poésie. Il a bien fait. Bien. Il ne pouvait pas faire autrement. Quand un Président constate le caractère insurmontable des circonstances, tout le monde se retire. C’est ainsi que ça se passe et ce devrait être toujours le cas. Mais ça ne l’est pas. C’est pour cette raison que nous continuons.

 

Je veux. Oui, je veux tout savoir. Les monades, les ménines, les ménades, je commencerai par cela. Puis les mers, celles du sud et celles du nord. Les musiques,les littératures, les langages. Les arts. Je mettrai la science dans une petite machine. Peut-être me découragerai-je ou le suis-je déjà? C’est encombrant le devoir de culture alors qu’il est fortifiant de prendre part à cet échange universel d’informations. Léger, lourd, que dire de cette distinction majeure si présente dans nos faibles discours? Fais toi léger. Tu es lourd. Grands devoirs et austères vérités. Je veux retourner dans ma cellule. Plutôt monastère que prison. En ville c’est bien aussi. Dans mes hôtels, mes résidences, chez toi dans ta maison. Là, encore, je fais face à un certain découragement lequel peut être replacé dans son contexte, celui d’une vie qui passe et se fait belle en passant. J’ai entendu des sottises aujourd’hui. A replacer dans leurs contextes également ceux de la sottise sont très étendus et répétitifs. On reste surpris et la surprise parfois se fait belle. Un éclair de perception et de compréhension vient changer les circonstances qui ne sont pas toujours insurmontables. C’est un défi. Il faut le tenir. Nous le tenons. Je tiens ici à formuler à l’attention de tous les présidents mes encouragements, silencieux, tacites, littéraux, mais sincères. Sans avoir à m’expliquer. Je le ferai dans la suite de mes emballements.

 

Je veux. Oui, je veux tout savoir. Les monades, les ménines, les ménades, je commencerai par cela. Puis les mers, celles du sud et celles du nord. Les musiques, les littératures, les langages. Les arts. Je mettrai la science dans une petite machine. Peut-être me découragerai-je ou le suis-je déjà? C’est encombrant le devoir de culture alors qu’il est fortifiant de prendre part à cet échange universel d’informations. Léger, lourd, que dire de cette distinction majeure si présente dans nos faibles discours? Fais toi léger. Tu es lourd. Grands devoirs et austères vérités. Je veux retourner dans ma cellule. Plutôt monastère que prison. En ville c’est bien aussi. Dans mes hôtels, mes résidences, chez toi dans ta maison. Là, encore, je fais face à un certain découragement lequel peut être replacé dans son contexte, celui d’une vie qui passe et se fait belle en passant. J’ai entendu des sottises aujourd’hui. A replacer dans leurs contextes également ceux de la sottise sont très étendus et répétitifs. On reste surpris et la surprise parfois se fait belle. Un éclair de perception et de compréhension vient changer les circonstances qui ne sont pas toujours insurmontables. C’est un défi. Il faut le tenir. Nous le tenons. Je tiens ici à formuler à tous mes encouragements, silencieux, tacites, littéraux, mais sincères. Sans avoir à m’expliquer. Je le ferai dans la suite de mes emballements.

 

Entendu au loin ce matin quelques cris. Une source de vie puissante dans le silence de l’aube. Indiscernable cette source, de même que la nature de l’incident. Des futilités bruyantes de fêtards ou une intervention de police, voire l’un et l’autre. Une bagarre de paumés du petit matin (comme dans la chanson). Peut-être que des coups de feu nous atteindrons de leur résonance dans un instant? Non, le calme revient. Puis les cris reprennent. C’est une discussion à très haute voix. Un dialogue à hauts cris. Une voix de femme. Elle dit ce qu’elle a à dire au plus extrême de ses forces vives. Un homme lui répond. Comme un ténor ou un baryton dans toute l’ampleur de sa voix. Il n’y pas de violence ni de vulgarité ni même de hasard dans ces propos criés. Cela semble important. Doit être dit. Une tragédie tout à la fois classique, singulière et banale. Tiré de mon sommeil, j’en suis au demi-réveil. L’incident ne me dérange pas alors que d’ordinaire j’en suis exaspéré. Utiliser à ce point tout son corps, les muscles, l’énergie, les organes de la voix, du plus profond de soi pour exprimer quoi ?

 

Je prends part mentalement à cette discussion et donne de la voix avec toute la force en moi, plus encore, c’est corporel, c’est idéal, émotionnel et intellectuel. Je crie avec eux. J’y suis. J’ai cette force. Mais les mots ne viennent pas. Quels sont les mots essentiels au point d’être criés en épuisant ses forces vives ? Quel texte ? Vite une tragédie grecque, un poème, un dialogue amoureux, un adieu. Je ne choisis pas. Aucun mot ne mérite d’être ainsi crié, aucun terme ne génère à ce point une si haute voix, une gorge déployée, sauf dans le domaine du sport, de la guerre ou de l’accidentologie. Ils ont crié pour s’épuiser; le reste, ils l’échangeront dans le silence du prolongement de leur vie.

 

A Genève, tous les 31 décembre, nous sommes réveillés par 23 coups de canons tirés sur les remparts. Cela rappelle, comme les feux d’artifices, les bruits de la guerre et les innombrables réveils devant la mort d’homme à homme, d’homme à femme, de femme à homme (je m’écarte de la quatrième hypothèse). L’aube grise de ce jour ne m’a pas déplu. J’ai eu ce problème de texte, cette question des mots essentiels. Mais j’ai aimé curieusement cette volonté de puissance vocale jusqu’à l’abrutissement. Trouver le texte qui pourrait être crié jusqu’à l’ultime seconde. Je ne le connais pas.

 

Les cris sont là pour nous sortir du sommeil ou nous sortir de la vie. Les trois modes d’expression qui subsistent – à l’exception des coups de canon et autres bruits de guerre – dans l’ordinaire de la vie tout autant que dans l’exceptionnel, sont la voix claire, le demi-mot, et le silence, qui se crée, s’utilise, se travaille et s’apprécie. A Milan cette semaine, un justiciable en faillite a tué trois personnes dont un juge et un avocat. Suite de la chronique judiciaire et extra-judiciaire le pilote, le co-pilote, le juge, le justiciable et les passagers. En France, à Tours nous l’avons vu et su, c’est l’accusé qui s’est tué, tout seul. Avant le procès. Désespéré et méritant. Méritoire, cette solitude, et désespérant. Ça donne le tournis ce tournus, mais la panique et le malheur sont feints moralement bien que sincères émotionnellement. Les registres regorgent d’actes de ce type, les mémoires aussi, avec moins de précision. Seule l’émotion ne s’en souvient pas. L’émotion est une compagne de l’instant, évanescente au travers des ans, fidèle animalement. Nous devons la nourrir pour lui permettre de nous être fidèle et nous la nourrissons, fidèlement. C’est un échange dans la vie très rude et nourrissant.

 

Le partage des émotions et des responsabilités est une grande affaire, à la verticale et à l’horizontale. Le failli a tué. Il doit être responsabilisé et le sera ou déclaré irresponsable. L’avenir le dira. La justice aussi. On les voit souvent ensemble, l’avenir et la justice qui est amèrement jalouse du passé. Elle l’apprécie mal et lui en veut pour cela. Elle entend tout maîtriser en ses dossiers et franchement ne maîtrise pas grand-chose en matière de réalité humaine. Personne n’y parvient. Elle administre le présent à peu près efficacement. Je l’aime bien cette vieille tante. Je la respecte et vais souvent la voir. Je sais qu’elle a fait beaucoup de mal. Mais elle vit encore et fait semblant de m’écouter ce qui me permet de ne pas demeurer inactif et de m’exercer dans les frimas de la démocratie sociale. C’est tout. Non ce n’est pas tout. Je cherche à échapper à son langage qui est une machine infernale. C’est un langage ancien, issu de la religion, de la philosophie et de la logique. Un langage qui s’abat sur vous et vous étreint de son humanité feinte, crache du feux, étouffe les faillis et mange le justiciable, désigne les vainqueurs et les vaincus, damnés et condamnés. Il faut faire avec, sachant ce qui se passe ailleurs. Au Texas ou en Chine. Mort ou vie.

 

Zéro ou un. Il faudrait pendant son sommeil, retirer à ma veille tante tout son savoir langagier et le remplacer par un ordinateur programmé par algorithmes. Des chiffres uniquement. Plus un mot. Une justice analytique et non plus une justice rhétorique. ça tranquilliserait les intranquilles. Bon là encore, je m’égare. Je développe en écrivant une délicieuse propension à l’égarement. C’est ma façon de faire face au vent. La profusion des mots, des assertions, des idées fortes, ou présentées comme telles, peut étouffer le lecteur de la presse d’aujourd’hui. Ça part dans tous les sens, les nuances sont là, l’insistance et la simplification aussi. A toi d’exister. Seul. Fais-toi apôtre ou trouve-toi des apôtres. S’immobiliser ou suivre le mouvement. Il y a toute cette consistance, cette épaisseur de la vie et de la mort déclamées. Puis ce plus rien qui rend béat de toutes les admirations enfuies, leur sujet ou leur objet confondus et rendus confus. Les mots prennent un pouvoir absolu mais ne l’exercent pas.

 

La pile de livres. L’afflux de textes, le vertige du lecteur. Cette période de la vie; notre savoir a un contenu qui nous mène à la capacité présente de prendre plus ample connaissance et de s’en avertir. Nous ne prenons pas garde au vide indéfinissable de l’ignorance qui nous accompagne en nous devançant. Nous sommes dans l’enchaînement, des circonstances et de soi. La semaine prochaine se présente bien, quelques échéances qui échappent à l’horoscope mais figurent à l’agenda. Des jours à venir au-devant desquels il est bien de faire le vide, par la pensée, l’absence de pensée, le mouvement, l’absence de mouvement. L’autre sera là, personnalisé, indéfini, multiple. Dans l’attente. Il faut sans cesse une attente. La sienne propre et celle de celui ou de celle qui attend notre présence et notre réponse. C’est à ce jeu là que nous jouons, que nous le voulions ou non. Il est ainsi juste et normal – naturel, considéré socialement – de se retrouver parfois sans réponse et désemparé. Mais la semaine prochaine ce ne devrait pas être le cas. Question de confiance dans le prochain pas, dans l’à suivre et la volonté de continuation. Nous sommes exigeants, tout bien considéré. Nous n’avons pas le choix. Je vais sortir, traverser le pont et la nuit, marcher et dormir en laissant retomber le flux de mes pensers.

 

Je ne me souviens pas l’avoir rencontrée. Elle était là pourtant et générait en moi quelques remémorations, quelques actualités ressassées, des sensations revenues, en voie de récurrente disparition, avais-je noté. Elle s’obstine dans un fatras émotionnel. Elle n’accepte de percevoir qu’une réalité, celle qui lui permettra de se donner le sentiment de résistance donc d’identité. Elle n’ira pas aussi loin. Sa vie divague, elle n’aura pas la froide sensation de céder. Le raisonnable, c’est la violence de l’autre. Elle aura toujours crié. Aucune métaphore ne la séduira. Seule la reconnaissance par la consolation des sentiments lui conviendra. C’est le soir. Le refuge de l’épuisement. Genève propose ses boulevards fuyants et la timide opiniâtreté de ses trams. Je me rendrai à la rue pour y découvrir le glacis de toutes les déconvenues, verbales, individuelles. L’ombre des feux ignorants. J’avance à grand pas dans le sang circulatoire de la ville qui discrètement me le rend bien. J’en deviens savant de tous les nouveaux silences et m’arrête devant le risque des comparaisons charnelles et traversières. J’accepte sans réellement deviner quoi.

 

Ce texte va vers l’oubli de ses dissonances et l’aridité de ses distorsions. Je me suis posé la question de l’usage du mot vanité qui se perd, Obsolète prend de la force alors que vaniteux en perd. On était vaniteux au temps de la morale religieuse. Du temps de la morale démocratique on ne saurait l’être. Ne pouvant l’être on ne l’est plus et l’usage se perd. Narcisse ou éhonté, voire pervers, reprennent du galon. L’emploi des mots, leur persistance ou leur renaissance disent presque tout du temps que l’on vit. Il y a les silences aussi. Les silences de l’histoire, des peuples, des familles, des individus entre eux. C’est à se demander si la vérité existe autrement que dans le questionnement que lui consacrent les sociétés. Il n’y aurait donc pas de vérité et c’est la réalité, sa sœur cadette (petite soeur) qui seule connaîtrait la vie ou l’existence éternelle. La vérité ne survivrait pas à l’homme qui en est l’inventeur fantasmatique. Seule la réalité nous aura précédés et nous survivra. Au plan de la croyance, j’en suis là. Sans interdit spirituel. Emballement auquel je me suis livré courant avril 2015 . J’ai plus délivré que déliré. A vrai dire. Délivré, emballé, rétention ou non rétention de soi?

 

26 avril 2015

Commentaires (2)

Starben CASE
01.08.2017

'"L'écriture demeure un privilège de l'individu seul avec sa réalité intérieure" Oui, mais c'est le véhicule  qui permet de franchir les ponts qui relient toutes nos réalités intérieures. Et ça, c'est magique! S'égarer, c'est se libérer. Merci André Birse'

We

Webstory
02.11.2015

"Pour que l'écriture soit réjouissance, il faut plusieurs lecteurs au moment même où l'auteur crée son texte." Extrait de "T'emballe pas" de © André Birse. Une réalité sur Webstory où les lecteurs peuvent suivre leurs webwriters favoris au fur et à mesure qu'ils écrivent, même pour les concours! Savourez ce texte qui est un va-et-vient poétique entre l'écriture et la réalité.

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