Comment réussir à voter pour ou contre 2

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ELLE : Comment réussir à voter pour quand on veut voter contre.

LUI : Comment réussir à voter contre quand on veut voter pour.

ELLE : Vous par exemple, vous êtes plutôt pour ou plutôt contre ?

LUI  : C’est un carré latin votre question !

ELLE : Carré latin ?

LUI : Pour la simplicité de ses règles et la complexité de ses résolutions voyons !

ELLE : Il y a forcément une réponse quelque part.

LUI : Je dois manquer de convictions.

ELLE : Vous êtes un irrésolu sympathique ! Mais un jour ou l’autre il faudra prendre parti.

LUI : Disons que j’hésite entre la politique du castor ou celle de l’autruche.

ELLE : Vos métaphores animales méritent un approfondissement.

LUI : Si je vote contre, je fais barrage à… Comme un castor. Si je vote pour je me mets en danger, donc je ne veux pas voir, donc je suis lâche, je suis une autruche.

ELLE : Il est vrai que vous avez un petit côté autruche sur les bords !

LUI : Pourtant je ne parle pas l’autruchien !

ELLE : Cette facétie ne nous mène nulle part !

LUI : Si tout droit à l’âne de Buridan !

ELLE : L’âne de Buridan ? J’en ai un vague souvenir. Il finit comment déjà ?

LUI : Mort de n’avoir su choisir. Donc avant de terminer comme un âne, je vote pour.

ELLE : C’est le bon choix sans aucun doute !

LUI : Foutaises ! Je n’ai jamais réussi à voter pour le bon candidat qui n’existe pas encore, alors par défaut je vote pour mais pour le moins pire. Donc d’une certaine manière contre ! Bref tout cela m’indiffère.

ELLE : Le plus bas degré de la liberté… cette liberté d’indifférence.

LUI : Je dois avouer que c’est très cartésien ce choix sans convictions, sans motifs. Sans rien !

ELLE : Vous votez dans le vide en somme.

LUI : Du vide assumé. D’autant qu’on vote toujours pour les mêmes. Pour ou contre.

ELLE : Je vous trouve un peu excessif !

LUI : Que voulez-vous, je suis un incorrigible négateur nihiliste.

ELLE : Tout cela à la fois, est-ce possible ?

LUI : Regardez autour de vous ! Le possible est partout.

ELLE : Si cela continue, vous finirez par ne plus voter ?

LUI : J’ai déjà répondu à cette question : le possible est partout ! À part ça, vous-même, où en êtes-vous ?

ELLE : Disons que je me reconnais davantage dans la deuxième interrogation : comment réussir à voter contre quand on veut voter pour.

LUI : Ce qui nous oppose radicalement.

ELLE : C’est un radical excessif.

LUI : J’aimerais comprendre. Comment en partant du pour, on arrive au contre ?

ELLE : Je ne prétends pas détenir la recette miracle loin s’en faut !

LUI : Un miracle pour réussir une recette, je n’y crois guère en effet.

ELLE : Sans croyance évidemment, il n’y a pas de miracles !

LUI : La réciproque est vraie aussi.

ELLE : Nous jabotons nous jabotons mais si nous jabotions utile ?

LUI : Vous avez raison, passons du jaboter utile au voter utile.

ELLE : Je n’ai jamais dit que mon pour était utile !

LUI : Alors à quoi sert-il ?

ELLE : Si intrinsèquement, je me sens attirée par le pour, il m’est impossible d’aller jusqu’au bout de ma conviction profonde puisque cela ne servira à rien. Mon pour n’ira jamais plus loin que le premier tour. Par contre, le contre

LUI : Mais si tout le monde fait comme vous, si personne ne lui laisse sa chance, à quoi sert-il ce pour ?

ELLE : À rien !

LUI : Ce n’est pas cohérent !

ELLE : Je suis pour l’incohérence utile, donc je vote contre ! Pour vous c’est la logique du moins pire, pour moi la logique du moins mauvais !

LUI : Êtes-vous heureuse de voter contre ?

ELLE : Je ne vois pas ce que vient faire le bonheur dans cette histoire.

LUI : Contentons-nous de la satisfaction alors. Êtes-vous satisfaite ?

ELLE : Je dirai que je suis une optimiste insatisfaite qui vote sans illusion.

LUI : Pourquoi voter dans ces conditions ?

ELLE : Il faut bien que je donne ma voie à quelqu’un ! Vous aussi d’ailleurs vous donnez votre voie.

LUI : La prochaine fois avant de donner ma voie avec un E,  je donnerai de la voix avec un X.

ELLE : Ce qui est une autre façon de se faire entendre !

LUI :  Et si nous  passions à notre petite expérimentation aléatoire et sonore.

ELLE :  Place à l’empirisme !

Ambiance jungle.

LUI : Nous nous trouvons actuellement en pleine jungle équatoriale française.

ELLE : Vous voulez dire en pleine jungle électorale ?

Fin de l’ambiance jungle début de l’ambiance jungle électorale.

ELLE : Nous abordons une indigène qui nous semble très aimable.

LUI : Madame, vous sortez de votre isoloir, c’est bien cela ?

MADAME : Oui et je m’y sentais désespérément seule !

ELLE : Nous aimerions connaître le fond de votre enveloppe…

MADAME : Oh la la… Le fond de mon enveloppe, c’est compliqué tout ça !!!

LUI : Faisons simple. Vous êtes plutôt du genre à voter pour ou du genre à voter contre ?

MADAME : Depuis mon réveil ce matin je suis plutôt du genre pour. Alors qu’au coucher hier soir, j’étais encore contre.

LUI : Racontez-nous cette volte-face.

MADAME : Figurez-vous que telle que vous me voyez, je présente six des neuf symptômes d’un trouble bipolaire !

ELLE : C’est formidable, six seulement !

LUI : C’est fou comme ça ne se voit pas !

MADAME : Heureusement grâce aux psychotropes prescrits par mon médecin généraliste et traitant, j’ai réussi à me stabiliser et passer du contre au pour !

LUI : Vous avez fait le bon choix moléculaire !

MADAME : Chimique mais efficace.

ELLE : Vous n’avez pas peur de replonger dans le contre ?

MADAME : Lorsque comme moi on a connu le fond du contre, on préfère rester dans le pour vous savez. C’est juste une question de posologie !

LUI : Changement d’ambiance à Poil dans la Nièvre !

ELLE : Vous êtes d’un potache !

Un homme vient à passer au loin.

ELLE : Tiens, un poilu qui s’apprête à voter…

LUI : Sachez que l’habitant de Poil, dans la Nièvre, est un pictien non un poilu !

ELLE : L’un n’empêche pas l’autre !

LUI : À potache, potache et demi !

ELLE : Monsieur ! Monsieur ! Vous vous apprêtez à voter, c’est bien cela ?

LUI : Va-t-il se mettre à nu ? Nous le saurons dans un instant.

MONSIEUR : Oui tout à fait.

LUI : Plutôt pour ou plutôt contre ?

MONSIEUR :  Pour.

ELLE : C’est définitif ?

MONSIEUR : Je ne suis pas niniiste,  je ne suis pas contriste,  je suis un vrai pouriste!

LUI : C’est contrariant.

MONSIEUR : Nous sommes pouristes de père en fils, c’est ainsi.

ELLE :  Passer du pour au contre ne vous tenterait pas ?

MONSIEUR : Je suis un homme de principes, pas de changements.

ELLE : Et si nous mettions la main à la poche peut-être seriez-vous prêt à changer de vote ?

MONSIEUR : Qu’est-ce qui vous fait croire que je pourrais accepter ?

LUI : Votre cupidité.

ELLE : Cela arrive même aux gens biens vous savez !

MONSIEUR : Je me dois de respecter la mémoire de feu mon père.

ELLE : Misère de l’habitus !

LUI : En échange de votre contre, nous vous proposons le double !

MONSIEUR : Le double de quoi ?

ELLE : Le double de la mise de base !

MONSIEUR : Ah quand même !

LUI : Alors ?

MONSIEUR : C’est non !

MONSIEUR s’éloigne. 

ELLE : Quel irréductible !

LUI : C’est un fait, nous avons échoué.

ELLE : Remarquez c’est rassurant. L’argent n’achète pas tout…

MONSIEUR revient.

MONSIEUR : Finalement, j’ai changé d’avis !

ELLE :  Vous seriez prêt à passer du pour au contre ?

MONSIEUR : Votre générosité aura eu raison de mes convictions. Vous me payez en liquide bien sûr ?

LUI : C’est fou comme il est aisé de franchir le Rubicon à Poil dans la Nièvre !

ELLE : Que voulez-vous. De pouriste à pourri, il n’y a qu’un pas !

 

LUI : Nous nous retrouverons plus tard pour un nouveau comment réussir.

ELLE : En attendant portez-vous bien !

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