Créé le: 23.08.2021
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L’avocat

Philosophie

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Pourquoi as-tu écrit une histoire sur Dieu ? Personne ne va la lire. Dieu n’est plus à la mode...
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Dieu n’est plus à la mode !

 

Cette phrase m’est restée collée sur le cortex cérébral. Au début je ne comprenais pas tout à fait. C’était comme dire que l’air n’était plus à la mode : aujourd’hui on respirait du CO2, l’eau n’était plus si branchée : de nos jours on consommait des sodas, les forêts ne sont pas si amusantes, on préfère de loin les parcs d’attractions, ou encore, les étoiles ne sont plus en vogue, c’est plus pratique les LED, etc…Mais plus j’y pense, plus la vérité se dévoile nue et sans maquillage devant mes yeux : oui Dieu, notre Bon Vieux Dieu n’est plus à la mode…et ses inventions : l’air, l’eau, les forêts, les étoiles non plus. Point.

 

J’ai fait une pause car admettre ceci m’a rempli le cœur d’un sentiment étrange : un mélange de pitié et de tendresse pour ce personnage désuet qu’on avait l’habitude de vénérer, de détester, de trahir, d’implorer, de condamner pour tous nos malheurs, à qui on avait l’habitude de demander des faveurs. Maintenant il est tout simplement loin de nos vies, écarté, mis aux oubliettes. J’ai toujours pris la part du plus faible : c’est le même sentiment étrange que je ressens lors d’une rencontre sportive, je me mets à soutenir l’équipe perdante ; ou quand je lis une histoire pour enfants : le pauvre méchant me fait de la peine car il perd toujours et il se fait tabasser à la fin. Eh, oui, vous avez deviné : dans ce cas je vais prendre la part de Dieu. Je vais devenir son avocat pour le temps d’un essai philosophique. Et pour utiliser une expression célèbre : je vais devenir l’avocat du diable : dans ce contexte… de Dieu.

 

Pour bâtir ma défense je dois d’abord répondre à 3 questions essentielles :

1.     Existe-t-il vraiment ? (Pour moi : ai-je un vrai sujet à défendre ?)

2.     Aimerait-il être défendu ? (Pour moi : mes services seront-ils acceptés ?)

3.     Quelles sont les accusations qu’on lui inflige ? (Pour moi : au moins choisir une, pour commencer)

 

1.     Existe-il vraiment ?

En réfléchissant sur le sujet, j’ai tout simplement décidé de partir de la prémisse qu’il existe, car défendre quelqu’un qui n’existe même pas, serait un défi trop difficile à surpasser pour une avocate en couches comme je me retrouve. Je suis tout de même convaincue qu’il y a dans ce monde d’illustres avocats expérimentés qui pourraient très bien gagner un procès même en défendant quelqu’un qui n’existe pas. Et oui : il faut qu’il existe. Il y a tant de savants (philosophes, théologiens, historiens, scientifiques, politiciens…) qui ont tourné autour de cette question, sans être nécessairement d’accord et tout en se permettant de changer d’opinion de temps à autre, que je ne vais pas faire couler plus d’encre pour écrire ce qui a été déjà écrit. De toutes les façons, on ne saura entièrement la vérité qu’au moment du face-à-face avec lui. Et puis, cela soit dit entre nous, la réponse positive à cette question m’arrange entièrement : comme ça mon essai pourra suivre son chemin.

 

2.      Pour répondre à la 2ème question : « est-ce que le Bon Vieux Dieu aimerait un avocat ? » j’ai décidé d’aller vérifier dans la Bible (dans mes convictions BVD est toujours associé à la Bible).

Les vieilles écritures m’ont donné une lueur d’espoir. A cette époque Dieu aimait bien la justice : il se défendait avec promptitude, il punissait avec véhémence, il menaçait et tenait toujours ses promesses. Si je réfléchis bien, il n’aurait même pas eu besoin de mes services, il se débrouillait tellement bien tout seul ! En arrivant au Nouveau Testament, les choses ont changé à 180° : Dieu ne se défend plus, tout simplement. Il n’a pas bougé un doit pour défendre son fils Jésus, ni les pauvres martyrs qui sont morts torturés pour leur foi…

 

Plus tard, en proclamant Dieu, les hommes ont inventé des dogmes, ils ont démarré des guerres, ils ont torturé, ils ont trahi leur famille et leurs amis, ils ont enfreint chaque commandement que Dieu même leur a donné pour justifier leur bonne volonté de défendre des lois qu’eux seuls ont créées à Son nom. …et Lui dans tout ça ? Rien. Pas d’apparitions spectaculaires, ni de miracles tape à l’œil, pas de punitions draconiennes, rien. A part peut-être d’envoyer un saint homme ou une sainte femme pour prier, servir de modèles, envoyer des messages de conversion et pénitence…sans beaucoup de succès cependant. Beaucoup de ses saints ont été méprisés, jugés, même tués sous l’accusation de blasphème cotre Dieu. Quelle ironie !

 

En revisitant l’histoire moderne, BVD perd petit à petit la hauteur de son piédestal :  on n’a plus peur ni de lui ni de ses adeptes, on voit qu’on peut très bien vivre sans lui et surtout sans toutes ces idéologies créées autour de lui. On se développe, on découvre, on invente, on devient émancipés, on se sent auto-suffisants. Comme on n’a plus peur ni besoin de lui, on se permet de l’ironiser, lui et ses peu de fidèles, de traîner son nom dans la boue, de l’accuser des malheurs présents, passés et futurs, de le réduire à l’inexistence et finalement, pire que tout…de l’oublier.

 

Et BVD n’intervient toujours pas, il ne se défend point, on dirait qu’il a décidé de laisser les hommes se démerder tout seuls.

 

Je ne peux pas m’empêcher de laisser m’échapper un gros soupir en pensant au travail qui m’attend ! Il semble bien que Dieu aurait besoin de beaucoup plus que la défense philosophique d’un avocat inconnu et sans études de spécialité…Mais pourquoi il n’intervient pas lui-même ? S’il existe vraiment et s’il possède tous les pouvoirs que l’on dit, pourquoi il reste si effacé, silencieux, inerte, sans réaction ?

 

3.     Pour répondre à ma 3ème question, j’ai essayé de revoir les accusations qu’on a infligées à Dieu au cours des siècles et celle de ne pas être à la mode doit être une des dernières dans le stade de l’évolution de l’être humain. Je vais commencer par celle-ci, je me sens plus à l’aise dans l’époque moderne et puis la mode m’a toujours beaucoup attirée.

 

Dieu (BVD) n’est plus à la mode, donc ! On va travailler là-dessus.

 

La mode : l’ensemble des habitudes vestimentaires, comportementales et de toute autre nature, instaurées à un moment précis de l’histoire humaine par un individu ou un groupe d’individus influents et suivis par la majorité des autres individus de la même communauté ou même par la majorité des êtres humains en général, indifféremment de leurs goûts, besoins, connaissances, aptitudes, mais souvent en fonction de leurs possibilités matérielles (je dois spécifier qu’il s’agit ici d’une définition strictement personnelle et non pas celle des dictionnaires).

Suis-je à la mode ? Difficile à dire. A la mode de Louis XIV je ne suis certainement pas, heureusement. A la mode d’aujourd’hui ? Pas si sûre car je n’ai pas eu le temps d’adhérer totalement : elle change avec une telle vitesse ! Maintenant que j’ai mentionné Louis XIV je me rends compte que la mode peut être parfois ridicule. Que penseront les générations futures de notre chère mode d’aujourd’hui : de nos coiffures, de nos jeans coupés, de nos jeux vidéo, de nos frites à la mayonnaise… ?

 

Si j’y pense, je crois que BVD fait preuve de beaucoup de sagesse en n’étant pas à la mode. Je le vois mal se plier à nos pauvres canons de beauté. Et si la mode d’aujourd’hui ne l’inclut pas dans ses habitudes, tant pis pour elle. Dieu, il a le temps, il est éternel lui !

 

J’avoue que mes sentiments envers ce BVD ont changé au cours de ma réflexion :  de la pitié, je suis passée au mépris et au jugement, ensuite à la colère et maintenant j’arrive au respect. Chapeau pour sa sagesse ! Je le vois presque sourire dans sa barbe dans les Cieux. Le fait qu’il n’a pas envoyé ses éclairs vers moi, comme Zeus au temps des vieux Grecs, après toutes les balivernes que j’ai pu écrire sur lui, c’est tout à fait à son honneur.

 

Vous savez à qui il me fait penser ? A mon père.

Père : voilà la clé, le mot qui change tout, le mot qui fait comprendre !

 

En fait ce n’est pas BVD qui a changé au cours de l’histoire mais c’est nous, c’est l’Homme. Au début de notre existence on était des bébés, des enfants, il était toujours là, il nous tenait par la main, il nous protégeait, nourrissait, rassurait, guidait et punissait ; et nous…on le vénérait. Ensuite on a grandi, il nous a donné les plus illustres des maîtres et quand il a pensé qu’on était prêts il nous a envoyé son propre fils : Jésus ; et nous…on a beaucoup appris. On a créé même des écoles à son nom pour perpétuer son enseignement. Ensuite on a créé des règles qui devraient conduire ses écoles ; mais bientôt les règles sont devenues plus importantes que l’enseignement lui-même. Et on a continué à grandir, on est devenus ados. Avec l’émancipation sont arrivés le questionnement, le besoin de dépasser nos limites, la rébellion.  Dieu, il semblait avoir perdu le contrôle de l’humanité ; et nous… on le méprisait.

Enfin, on est devenu adultes : la Maturité de l’Homme, l’âge des certitudes, des accomplissements, des jours bien remplis et des nuits bien trop courtes, l’âge du verbe « avoir ». Dieu n’a plus de place dans nos vies chargées, on l’a mis de côté, à la maison de retraite. On va le voir peut-être de temps à autre, en cas de besoin ou pour des exigences sociales et culturelles. Dieu subit et nous… on l’oublie. Dieu n’est effectivement plus à la mode.

 

Les questions se précipitent dans ma tête : quelle sera la suite de l’histoire ? L’Homme arrivera-t-il à l’âge de la sagesse ? Pourquoi on a grandi ? C’était inévitable ? Jésus nous a prévenu cependant, il nous a demandé de rester enfants ! Que fera Dieu ensuite, lui qui est infini, éternel ?…

 

…et tout à coup, j’ai compris : il n’y aura jamais de procès entre Dieu et l’Homme, pas d’accusation, pas besoin d’avocat. Quel père enverrait son fils en justice ? Quel fils n’a pas « accusé » ses parents de ne pas être à la mode, de ne pas le comprendre, de lui avoir donné un nez trop grand, trop peu d’argent ou tant d’autres accusations que les parents subissent en silence ?

 

Nos parents ne sont pas parfaits mais leur amour est toujours avec nous.

Si Dieu est parfait…comment doit être son amour alors !?

 

Non, Dieu n’a pas besoin de mes services. Il ne va jamais se défendre contre ses enfants. Il n’est pas non plus inerte, sans réaction. Il s’est retiré pour nous laisser vivre, expérimenter, tester la mise en pratique, ou pas, de ses enseignements. Mais son œil est toujours sur nous, son oreille toujours prête pour écouter notre appel, sa main prête à nous soutenir ! Quelle chance ! Quel soulagement !

 

Définitivement, Dieu n’est pas à la mode ! …mais c’est parfait comme ça !

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