Créé le: 15.08.2023
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Autour de Grand-Maman il y avait des cousins et bien d’autres
Tout un monde s’est créé autour de Grand – Maman. Des repas, des mets, des gâteaux, du beurre et du sucre mais surtout des souvenirs.
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A peine je me remémore des réminiscences d’enfance autour des rires et de l’insouciance d’une jeune enfant que j’en viens à penser à ma Grand – Maman. Dans ces moments de vacances, de fêtes de familles et de partages légers. C’était il y a plusieurs années autour de tablées grandioses et d’amusements familiaux ponctués de mets conséquents et de vin ou encore lors des goûters avec du chocolat ou encore avec ces fameuses crêpes chaudes que nous nous efforcions de ne pas poser sur nos visages tels les petits farfelus que nous étions. Il y avait aussi cette fameuse soupe ou encore cette sauce à salade mettant nos papilles en émoi.
Plusieurs cousins évoluaient dans les pas de Grand – Maman, dans sa cuisine, dans sa buanderie ou encore dans son frigo. C’était Grand – Maman qui préparait l’ensemble des repas, qui s’occupait du linge, de la maison et de la préparation de ses excellentes truffes au chocolat que je me suis retrouvée à chercher à quatre-pattes dans le noir devant le frigo de la buanderie. Il y avait aussi la réserve d’aliments au galetas à partir de laquelle une rumeur avait circulé qu’une petite souris avait picoré le coin d’une plaque de chocolat ou encore d’une boîte de biscuits secs … Une petite souris qui devait avoir mes dents et ma gourmandise. Nous avions bien ri une fois l’aveu tombé.
Des moments plaisants, il y en a eu d’autres, notamment autour de l’attention portée à l’écoute du bruit du claquement des talons de Grand – Maman contre ses sandales de maison quand elle se déplaçait affairée à s’occuper du dîner ou encore à venir s’assurer que nous nous occupions avec des jouets convenables et non pas avec des objets précieux comme il y en avait dans le salon de toute sorte : des pierres précieuses, des statues africaines ou encore ces fameux œufs taillés dans des minéraux de collection. Parfois, nous ne pouvions résister à souffler dans les trompettes qui traînaient dans les environs ou encore à ouvrir les armoires avec portes vitrées contenant les trésors. Une des chaises en bois d’Afrique n’a pas survécu et s’est vue coupée du haut de sa taille sculptée en finesse dans du dalbergia. L’assise du mobilier ayant plié sous notre poids : il ne lui restait plus que le gros de son socle et ses pieds.
Sur ce coup, Grand – Maman n’était pas contente et nous a montré son mécontentement. Heureusement, Grand – Papa n’était pas présent ; ce qui nous aurait valu de sérieuses représailles. Pour Grand – Papa, Grand – Maman a toujours cuisiné et il y avait tout le temps des patates en accompagnement et un verre de rouge. Nous mangions des pommes de terre apprêtées de diverses manières mais tout autant délicieuses les unes aux autres. Pas de vin pour nous par contre, de l’eau. Nous aimions la cuisine qui était préparée et que nous pouvions déguster au domicile de Grand – Maman ou encore lors des succulentes vacances au chalet. Dans le cadre du domicile, nous avions le choix entre la terrasse, la tonnelle ou encore le carnotzet réservé aux préparations odorantes. Les discussions à table étaient toujours intellectuelles ou alors pouvaient parfois être réservées à mes Grand – Parents qui s’exprimaient dans une langue incompréhensible dont ils maîtrisaient les usages.
Les vacances au chalet sont dignes de souvenirs impérissables et de pratiques de repas singulières. Il y avait toujours des ‘’petits-beurre’’ pour le cousin qui ne mangeait que ça. Lorsque le grand cousin avait mangé tous les précieux biscuits du petit, il y a eu un problème. Grand – Maman a réprimandé le grand cousin et le petit a pleuré. Pour le déjeuner, nous mangeons des cornflakes voire du riz au lait pour les grands. Le petit n’aimait ni cela ni le pain et sans ses ‘’petits-beurre’’, il ne lui restait donc uniquement le chocolat chaud. Pour les chambres, le plus grand avait sa chambre et les petits partageaient la leur. En même temps, tant mieux car la chambre du ‘’grand’’ sentait diablement mauvais.
Là aussi, nous nous amusions avec les moyens à disposition à intervalle des temps plaisants de repas et de goûters. La nature nous offrait de quoi confectionner des cabanes dans les bois, des arcs et il y avait même une corde suspendue au plafond dans une partie du chalet. Celle-ci nous permettait de nous balancer énergiquement. Pas de jeu sur des écrans, ni de smartphone et ni même de télévision. Nous nous réjouissions des balades et des sorties en ville pour les achats des courses ou autres. Il y a eu une sortie aux bains thermaux, fort appréciable. Lors des déplacements, tous les cousins se retrouvaient serrés dans la voiture de Grand – Maman et concentrés à regarder la route pour ne pas être pris de nausée.
Parfois au supermarché, il y avait des frictions. Chacun voulait son dû et Grand – Maman avait uniquement un porte – monnaie. Nous étions aussi mis à contribution, principalement les filles, à la préparation des repas ; ce qui avait quelques privilèges en termes de choix des aliments. Une fois je me suis retrouvée de tâche ‘’sandwichs’’ et cela ne m’a pas réussi. Effectivement, mon côté déjà économe de l’époque avait pris le dessus et chacun avait eu un sandwich sec sans une réelle couche de fromage à tartiner. Le seul épargné fut le petit cousin qui ne mangeait que ses bâtonnets de saucisson sec. Il y a eu des pleurs ce jour – là, des vols d’aliments et des excuses.
Avec Grand – Maman, il n’y avait pas de vin à contrario du reste de la famille qui en buvait. Par contre, il y avait du beurre dans la quasi-totalité des plats et des pâtisseries. Parfois, quand nous avions un petit coup de mou, une branche de chocolat s’offrait à nous pour réconforter les âmes. Cela fut le cas lorsque je pleurais de ne pas réussir à parler assez fort pour mon exposé de géographie. Réfugiée un jour dans une chambre à force d’entendre les demandes de mes Grand – Parents de parler plus fort ou encore leur suggestion de me munir carrément et en urgence d’un micro pour ma présentation en classe, j’étais triste de telles remarques après toute la préparation faite pour ce travail. Grand – Maman est arrivée avec deux branches de chocolat, que j’ai mangées même sans avoir faim.
En ce temps – là, aux fêtes de famille, les adultes étaient à une table autour des bouteilles de vin rouge et les enfants à une autre table – de camping souvent – autour de la carafe d’eau et des chocolats voire des bonbons entreposés en guise de décorations. Pour le vin, un des cousins a une fois bu l’ensemble des petits fonds de verres à vin blanc présents sur la table basse, tous rescapés de la fin d’un apéro d’époque standard d’une fête de famille tout autant anciennement basique. Un peu remué le cousin, mais pas de gravité dans l’ingestion.
Chez les adultes, le vin semblait avoir remplacé en partie la décoration peut – être superflue. Autour de notre table de camping, nous nous amusions parfois à manger le sucré avant le salé ou encore à souffler dans le trou des lapins de Pâques délestés de leurs oreilles. Nous en avions plein les doigts, mais nous adorions cela. Il arrivait aussi d’entendre nos voix imiter des membres adultes de la famille ou encore employer des termes spécifiques à Grand – Maman comme le renommé ‘’windjack’’ ou encore l’appellation ‘’fifille’’.
Une fois, lors de ces grandes tablées, nous étions réunis à l’occasion du retour de vacances des Grand – Parents partis en Grèce. Une catastrophe se produisit : la moussaka tomba au sol à la sortie du four tentée pour le coup par Grand – Papa. Le temps de confection du plat approchait la journée entière et avait sollicité l’aide d’une des belles – filles. Des larmes coulèrent le long des joues de Grand – Maman qui n’avait plus que des feuilles de vigne et du riz pour ses convives. Un drame pour elle, je lui fis un câlin. Avec le vin, les photos de vacances et les explications de Grand – Papa autour des loisirs passés dans le berceau de la civilisation, la soirée passée ensemble fut agréable tout de même tout en laissant ce souvenir amer autour de cette moussaka. Nous avons plus vu de moussaka jusqu’à présent.
Il y en a eu encore d’autres de ces moments de partages, de souvenirs, d’expériences ainsi que de moments d’activités familiales non très loin toujours de repas, d’apéros ou de goûters. A la maison de mes Grand – Parents, il y avait un jardin qui permettait des jeux d’eau l’été et la confection d’un énorme igloo l’hiver, quelle chance. Nous en passions du temps à construire l’igloo ou des bonhommes de neige tandis que Grand – Maman confectionnait de quoi raviver nos estomacs ou que les adultes buvaient le vin, le café ou les digestifs. Une piste de pétanque a animé quelques après – midis au soleil. Des tournois auxquels le papa d’un des beaux – fils avait été convié. Le mot ensemble avait pris corps à cette époque.
Grand – Papa a toujours été très investi dans la capture des moments avec son appareil photo, la confection de livre dans son bureau enfumé ou encore la création de films vidéo qu’il avait un tout grand plaisir à partager. Grâce à son engagement, nous avons de fabuleux livres composés de diverses photographies de famille ainsi qu’un véritable livre d’Histoire qui retrace même son enfance et son adolescence. Nous en avons appris des choses à la lecture de cette œuvre. Grand – Maman s’en est inspirée et a créé son propre livre également. Ces ouvrages vagabondent dans la famille et permettent de partager et transmettre sans le besoin de passer par les rencontres familiales en présentiel et en grand comité.
Tout le monde n’aime pas les photos, certains ne seraient effectivement pas photogéniques selon eux, d’autres ont ‘’un gros nez’’ ou encore ne désirent pas se voir en image. Est-ce par crainte de visualiser que le temps a passé ? ou est -ce pour ne pas prendre le risque de rester un peu plus longtemps présent sous format papier sur cette terre ? Pourtant, les souvenirs c’est merveilleux. Ce sont eux qui constituent notre histoire et qui découlent de nos liens, nos amours, nos doutes, nos fous rires, nos tristesses, nos désillusions et de tout ce qui teinte notre essence et lui donne du sens. Quel plaisir j’ai à regarder les images depuis petite, nous en avons passé du temps avec les albums photos créés par Grand -Maman, elle dessinait même à côté des photos à l’aide d’un crayon blanc qui se voyait bien sur le papier noir. Les albums étaient à côté de la télévision et nous avons escompté plus d’instants à contempler les images qu’à regarder l’écran.
Les réunions ne sont plus, les Grand – Parents non plus, les téléphones ou les entrevues entre deux rendez-vous ou weekends chargés ont pris place. Les gens sont pressés. Le temps a volé ces moments, ils se sont effacés et ont laissé place à d’autres réalités et d’autres espaces de partages et d’animations. Mais les souvenirs restent et permettent d’activer une part de notre mémoire qui surgit à présent principalement de manière individuelle voire en toutes petites assemblées. Cela auprès toujours d’un verre de vin, de patates ou encore d’une boîte de petits-beurre, qui accompagnent les mémoires qui s’éveillent et voyagent autour de mariages d’exquises sensations.
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