Extrait d'un long dialogue entre deux amis, ''Brume'' parle de rencontres douces mais pas légères, qui nous font naître et vaciller en un seul temps.
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[…]
– J’ai pensé à toi l’autre jour en passant près de la boulangerie. J’ai vu Ariane dedans… As-tu de ses nouvelles?
– …Qui t’a donné la permission de me bousculer ainsi en toute légèreté ? On dirait une plume sortie de ta bouche avec le poids d’un tonneau…!
– Navré, j’ignorais que ce sujet pesait encore après toutes ces années…
– Oui, enfin, non…enfin…changeons de sujet, je t’en prie.
– Comme tu le souhaites. Inconfortable dans le silence, il poursuit. Tu sais, on m’a toujours dit que ma langue écrite était bien meilleure que celle parlée. Tu le trouves aussi ?
– Je n’en sais rien mon ami…je ne t’ai jamais lu d’ailleurs…D’une voix basse avec l’espoir de ne pas être entendu. Elle était seule ?
– Qui ?
– Ariane !
– Tu m’as demandé de changer de sujet, alors décide-toi! D’ailleurs non, elle n’était pas seule, elle était accompagnée d’un homme.
– Enfin bref, pas mes affaires…Cédant vite à sa curiosité et sa soif d’avoir de ses nouvelles. Une toute dernière, il était comment ? Jeune ? Âgé ? Son père ? Son frère ?
– Ni son frère ni son père, mon pauvre homme. Mais ils n’avaient pas l’air d’être en couple non plus.
– Comment le sais-tu ?
– Je ne sais pas…ils avaient un comportement plutôt formel, un collègue de travail ou un client peut-être. Mais il se peut que je me trompe. Elle te tourmente toujours, je vois ?
– Elle n’a jamais cessé.
– …
– Le jour où je l’ai rencontrée, j’ai eu comme une forte fièvre montée très vite. J’ai halluciné. Malgré toute sa douceur…son arrivée dans ma vie a été d’une violence déstabilisante. Elle m’a complètement désarmé. Avec elle, j’étais moi-même, pas d’artifice. Elle s’est vite installée en moi sans qu’elle s’en aperçoive même. Je ne sais toujours pas ce que c’est, ce charme. Est-ce possible qu’une tendre amitié nous bouscule autant ? Est-ce possible que ce soit autre chose que de l’amour ? Mais j’ignore si la magie a opéré si intensément de son côté…je sais qu’elle avait du plaisir à passer du temps avec moi, mais elle, …elle m’habitait. Et avec le temps, le flou en moi est devenu brouillard épais et j’ai pris mes distances pour nous protéger. Cela fait quelques années que je l’évite dans la mesure du possible, que je tente de tout lui dire sans même le prononcer, dans l’espoir qu’elle me l’affirme aussi, avec ses yeux qui parlent.
– Pourtant, tu m’as semblé détaché la dernière fois qu’on en a parlé…
– Mon ami, j’aimerai tant me débarrasser de son idée simplement, tel un habit qui n’est pas à notre taille, vite fait et avec certitude, sans hésitation, irréversiblement. Si seulement je pouvais aligner ma raison et mon coeur, les mettre d’accord. Mais pour le moment je n’y arrive toujours pas, j’avoue…elle me revient par vague et je la chasse désespérément. Une porte que j’ai pourtant fermée, pourquoi s’entrouvre-t-elle à chaque brise ? Une page blanche sur laquelle je ne veux ni peux écrire, pourquoi ai-je du mal à la tourner ? Je la désire passionnément mais être avec elle est tout sauf raisonnable, tout sauf possible. Peut-être qu’il n’y a qu’un seul chemin pour mettre fin à cette obsession. Peut-être que je n’ai d’autre voie que de briser mes fantasmes et de lui parler. Au risque de la perdre à jamais.
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