Créé le: 26.08.2016
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Violette rêve, Violletta vit (08) Le rameau d’olivier
«Je vous adjure filles de Jérusalem, si vous trouvez mon amour lui conterez-vous que je suis malade d’amour ?» Cantique des Cantiques
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« Je vous adjure filles de Jérusalem, si vous trouvez mon amour lui conterez-vous que je suis malade d’amour ? » Cantique des Cantiques
Tout commença au printemps, lorsque Giovanni, le fiancé de Chantal, fut invité à effectuer une tournée de récitals aux Etats Unis avec la troupe de jeunes chanteurs dont il était le soliste. Sa magnifique voix de ténor lui permettait d’envisager un avenir prometteur et cette série de concerts allait certainement y contribuer. Il eut quand même beaucoup de peine à prendre la décision de se séparer pour plusieurs mois de sa bien-aimée mais elle l’encouragea à accepter la proposition en lui promettant qu’elle le rejoindrait dès que cela serait possible. Elle ne pouvait abandonner le cours qu’elle était en train de suivre pour obtenir le diplôme indispensable à la poursuite de sa carrière. Malgré sa peine, le jeune homme prit donc l’avion un matin de mars après des adieux très douloureux. Au moment de la séparation, Giovanni a tiré un petit paquet doré de la poche intérieure gauche de sa veste. « De mon cœur à ton cœur » a-t-il dit à Chantal en le lui offrant. Dans la boîte, elle a trouvé un rameau d’olivier en or avec une chaînette qu’il a immédiatement accrochée autour du cou de sa princesse. « Jamais je ne m’en séparerai car elle m’annonce ton retour, a-t-elle murmuré. Je sais que nous regagnerons ensemble la terre ferme même si nos barques se séparent aujourd’hui. »
Lorsqu’il a vu revenir la colombe avec le rameau d’olivier dans le bec, Noé a su que le déluge était terminé. Aujourd’hui, il s’agit plutôt d’un déluge de larmes mais Chantal attend d’être seule pour les laisser couler.Quelques semaines passèrent au cours desquelles la jeune fille travailla intensément à la préparation de ses examens au conservatoire et les nouvelles qu’elle recevait régulièrement de son amant étaient si positives qu’elles lui permettaient de supporter sa solitude. Il avait un programme chargé qui ne lui permettrait pas de rentrer durant l’été. Chantal espérait le rejoindre mais le voyage n’était pas encore organisé car elle voulait le financer elle-même, sans compter sur l’aide de sa mère. Madame Marti, médecin-dentiste renommée, avait de grandes ambitions pour sa fille unique. Un jeune chanteur lyrique ne pouvait être son gendre idéal. Et surtout, elle considérait les gens du Sud comme des séducteurs volages dont il fallait grandement se méfier. Les amours de Chantal ne lui plaisaient donc guère. La présence assidue du Dr Marcau lors des récitals au cours desquels sa fille chantait avait suscité en elle un espoir et elle avait assisté avec fierté à la soirée de Noël à l’hôpital où Chantal avait été invitée à se produire par cet homme reconnu et admiré pour ses grandes qualités professionnelles. La présentation dithyrambique qu’il fit de l’artiste l’avait secrètement flattée. Mais elle ignorait tout des témoignages amoureux dont il la couvrait.
Au début du mois de juin, Chantal aperçoit non loin de l’hôpital Jocelyne, une camarade du conservatoire qui est membre de la troupe partie aux Etats-Unis. Sa surprise est donc immense de la voir déjà de retour et elle se précipite vers elle pour lui demander des nouvelles de son fiancé. Il sera
si doux de pouvoir parler de lui avec quelqu’un qui l’a vu récemment et qui peut décrire mieux que ne le font ses lettres les succès qu’il doit certainement remporter. Sa déception est immense lorsque son amie invoque un contrôle médical et refuse la discussion. L’explication qu’elle donne est assez confuse car elle prétend ignorer combien de temps vont durer les examens et il ne lui est pas possible de fixer un rendez-vous à la jeune fille que visiblement elle ne tient pas à rencontrer. Chantal insiste et propose même de l’attendre dans le hall de l’hôpital. Pour mettre fin à une situation qui lui semble insupportable, Jocelyne lance alors à la fiancée éperdue une phrase qui va détruire sa vie en une fraction de seconde : « Giovanni va très bien, il est très apprécié par les critiques et le public, il ne pense pas revenir…. Il a rencontré une chanteuse Américaine et ils sont devenus très vite inséparables. Ils chantent ensemble et vivent ensemble. »
Après avoir délivré son message de mort, Jocelyne s’engouffre en courant dans le bâtiment hospitalier et Chantal reste pétrifiée sur le trottoir. Le monde s’est dissout autour d’elle et tout son sang s’est retiré de ses veines.
Cette nouvelle la foudroie. Les sincères déclarations de son amant à l’idée de son arrivée prochaine l’ont persuadée qu’il était heureux de la revoir. Bien sûr, il manquait un peu d’enthousiasme mais il affirmait qu’il redoutait de ne pouvoir passer tout son temps avec elle et qu’il ne voulait la faire souffrir en la laissant seule. Elle avait ri de ce souci et répondu qu’elle s’assiérait discrètement près de lui et que l’écouter chanter remplirait son âme d’une énergie précieuse. Il avait semblé alors rassuré. Du moins c’est ce qu’elle avait cru.
Chantal est entourée de démons et de lutins qui veulent l’attirer dans une forêt profonde. Elle tente de résister à leur appel et de leur échapper en fuyant mais ses jambes ne la portent plus. Elle s’effondre sur la route qu’elle voulait traverser sans avoir regardé si le passage était libre. Une voiture arrive et la renverse.
Lorsqu’elle ouvre les yeux, elle voit sa mère, le Dr. Marcau et une infirmière autour du lit dans lequel elle repose. Avec beaucoup de ménagements, ils la mettent au courant de l’accident qui lui est arrivé une semaine auparavant et de la chance qu’elle a eue d’en avoir été victime devant l’entrée de l’hôpital. Elle a pu être soignée et opérée très rapidement par le docteur qui a passé beaucoup de temps à son chevet lorsqu’elle était dans le coma. Chantal apprend que sa jambe droite a été fracturée en plusieurs endroits lors de sa chute mais le pronostic est favorable et elle pourra certainement marcher à nouveau sans cannes après une longue rééducation. Cette bonne nouvelle la laisse indifférente à la surprise de son entourage qui en conclut qu’elle est encore assommée par les médicaments.La jeune fille ne comprend pas pourquoi elle est encore là. La vie n’a plus d’importance pour elle car elle vient de se souvenir de la trahison de son amant. Les sanglots l’étouffent et elle ne peut les retenir. « Réaction normale » affirme le médecin qui lui prend délicatement la main et la serre dans la sienne sans poser de question. Sa mère prétexte un rendez-vous professionnel pour prendre congé. Elle quitte la chambre en promettant de revenir le lendemain car elle ne veut laisser transparaître l’angoisse qui a été la sienne depuis ce téléphone lui annonçant que sa fille était entre la vie et la mort
Sa peur de la perdre a été si forte qu’elle doit maintenant retrouver du courage pour l’accompagner vers la guérison totale. Guérison qui ne se produira que lorsque Giovanni pourra être au chevet de celle qui revient de si loin. Madame Marti ne connaît pas l’adresse du jeune homme et elle n’a pas encore pu l’informer de la situation. Mais Chantal sera certainement heureuse d’annoncer elle-même de bonnes nouvelles à l’homme qu’elle aime.
Aussi n’en croit-elle pas ses oreilles lorsque la jeune fille lui déclare le jour suivant qu’elle avertira son fiancé en temps voulu. Au grand étonnement de sa mère, elle ne semble pas prête à lui parler ; cette attitude est mise sur le compte du choc immense qu’elle a subi. « Peut-être veut-elle attendre un peu pour pouvoir le rassurer plus totalement » se dit-elle. Elle décide de rester discrète car elle se souvient de son hostilité envers le jeune homme et il lui appartiendra de montrer progressivement son changement d’attitude. Changement qui a été provoqué par les appels insoutenables que Chantal parvenait parfois à émettre du plus profond de sa nuit. Lorsqu’elle prononçait le nom du jeune homme d’une voix désespérée alors qu’elle restait inerte face à toute tentative de communication du Dr Marcau, sa mère s’était promis de ne plus jamais s’opposer à son idylle, si la vie lui était rendue.
La tristesse de la jeune fille est si intense que le médecin lui prescrit des antidépresseurs qu’elle ne prend pas. Elle a découvert dans sa table de nuit la chaînette avec le rameau d’olivier mais elle ne veut plus porter ce symbole d’une trahison insurmontable. Ses journées sont occupées à accomplir de manière mécanique tous les mouvements que lui impose le programme de l’hôpital. Elle ne sourit plus et ceux qui l’ont connue si gaie renoncent peu à peu à la retrouver.
Sa mère n’ose pas lui poser de questions sur son compagnon dont le prénom n’est plus jamais prononcé.
A suivre: Chapitre 9 La petite Violetta
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