© 2022-2024 Cecile Collet

"Assis à la table de la kitchenette de mon studio, je m'employai à construire mon royaume. D'électricien sans ambition, je passais à collectionneur d'art. J'avais compris au fil du temps que c'était lui qu'elles cherchaient, reléguant au rôle de figurant l'homme normal que j'étais."
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J’avais le choix. A ma disposition, pléthore de profils correspondant à la personne que je cherchais pour ce jeu de dupes. Un catalogue de femmes avides de rencontres, de sensations fortes, d’une nouvelle vie. Un florilège de coeurs à prendre, d’âmes à séduire, d’orgueils à gonfler.

C’était un projet que je nourrissais depuis longtemps. Qui, parti d’une lubie, avait pris soudain un peu d’ampleur pour aujourd’hui occuper une place prépondérante dans ma vie. Assis à la table de la kitchenette du studio que j’occupais au centre d’une petite ville de province, je m’employai à construire mon royaume. D’électricien sans ambition, je passais à collectionneur d’art. Artiste à ses heures, car la beauté attire la beauté, non? Mon ascendance molle et peu glorieuse allait soudain taper dans la particule: des souvenirs d’enfance à Monaco, une résidence familiale en Sardaigne, j’osai même l’oncle en Amérique…

Si la petite cuisine du collectionneur restait assez fidèle à celle de l’électricien, elle était destinée à des employés temporaires loués à l’occasion de rares dîners mondains. Car mon avatar se devait d’être solitaire, comme un prérequis pour qui cherche l’âme sœur.

En revanche, le reste de mon logement s’étirait comme un chat au réveil. Les lucarnes étroites, opacifiées par le calcaire déposé là par la pluie, se muaient en baies vitrées sur la mer, aux lourdes portes coulissantes. Le libre roulis des vagues se substituait aux klaxons des chauffards, frustrés d’être stoppés net dans leur course quotidienne, et le rire des mouettes remplaçait ce faux accordéoniste qui espérait encore obtenir quelques pièces d’un passant coupable.

Mes doigts s’emballaient sur le clavier de mon ordinateur. Un plaisir sulfureux m’emplissait le ventre dans cet exercice licencieux d’usurpation d’identité. Il y avait de la rancoeur, oui. Mais au gré du tissage de ce CV factice, que je faisais et défaisais telle Pénélope, l’excitation l’emportait sur l’aigreur. Celle qui se prendrait dans ma toile en aurait pour son argent. Le gendre idéal sonnait bel et bien à sa porte.

***

J’avais compris au fil du temps que c’était lui qu’elles cherchaient. Lui et seulement lui, reléguant au rôle de figurant l’homme normal que j’étais. Trop petit, les tempes dégarnies avant l’âge, les yeux bruns au lieu d’être bleus. Une sorte d’invisibilité rampante qui faisait son œuvre sur ma posture, courbe et non fière et droite, pleine d’excuses plutôt que de promesses.

J’avais réussi à vivre avec ça jusque là. Et puis il y avait eu comme un glissement qui révèle les fêlures entrouvertes, qui les écarte au point de laisser passer le jour. C’est cela qui me poussait aujourd’hui à agir. J’étais las de me convaincre que ça irait, de me complaire dans une médiocrité et un inconfort qui me rendaient antipathique à moi-même.

A force d’admettre le rôle que la comédie humaine m’avait assigné, je m’étais éloigné de la rive. J’avais ramé pour ne pas disparaître. Là, j’étais décidé à regagner la côte, larguer les amarres et mordre à pleines dents les luxuriantes victuailles dont d’autres s’étaient repus sous mes yeux tandis que je me contentais des restes. La vengeance est un plat qui se mange froid, mon repas frisait le surgelé Picard, justifiant, me semblait-il, des actes proportionnels aux souffrances subies.

L’ultime rejet était celui de trop. Il n’avait rien de particulier à part le fait d’arriver en queue de liste. Celle qui l’avait perpétré ne méritait pas d’être nommée – ni plus cruelle ni plus dénigrante que les autres -, celle qui en subirait les conséquences serait tout aussi anonyme, d’où le choix d’une rencontre virtuelle. La seule qualité que je lui demandais, c’était la vanité. Et sur l’écran de mon portable, le défilé d’égos boursouflés me laissait entrevoir un large champ des possibles et me confortait dans mon égotisme.

***

Laissant en plan le descriptif pompeux de mes péchés culinaires – j’avais choisi une plate-forme de rencontres haut standing, où le profil de l’utilisateur passait au crible les goûts et dégoûts – j’allai me réchauffer une boîte de raviolis dont la date de péremption tutoyait ma grand-mère. La vieille plaque sur laquelle j’avais posé mon bain-marie grésilla un peu avant de rendre l’âme. Les cordonniers sont les plus mal chaussés.

J’entamai la boîte froide quand un signal retentit. Un message s’était affiché sur mon écran, m’éloignant de mon frugal casse-croûte. Posant ma fourchette encore gluante, je le déchiffrai. « Bonjour Xavier. Jolie photo! Nous vivons dans le même coin. On se voit? »

Avant même que j’y attache un alevin, on avait mordu à mon hameçon. Nathalie A., 38 ans, cadre bancaire, venait d’entrer dans ma vie parallèle. Je fis défiler son profil avec appétit. Ses auto-portraits passés au filtre lissant des Instagrameuses laissaient voir une femme sans défauts. Des références littéraires pointues, des enfants déjà grands, une carrière installée promettant un revenu important, un style mêlant humour et intelligence, un air détaché qui la rendait attachante…

En découvrant le pédigree de cette invitée inopinée, je fus presque un peu déçu. Elle était trop parfaite et me renvoyait à mon usurpation. Et si elle me perçait à jour? Si je n’étais pas à la hauteur de mes plans? Respirer, ne pas s’emballer, garder coûte que coûte la distance qui me permettrait la froideur nécessaire au méfait.

Nathalie A. pointait sans le savoir le doigt sur mon inconsistance. Ce sentiment coutumier d’infériorité, de vulnérabilité, je le connaissais trop bien. L’émotion naissante me submergeait déjà. C’est elle qui avait ouvragé ma vie durant ces petites brèches aujourd’hui béantes.

Et si Nathalie n’était pas ce qu’elle prétendait? Si elle aussi avait falsifié son bulletin de notes afin de le rendre plus attrayant? Je cherchais des prises pour escalader le gouffre dans lequel je glissais. Résister, redevenir Xavier, faire languir! Je sentis que si j’arrivais à répondre à ces auto-injonctions, mon avatar pourrait prendre corps. Il fallait que je voie Nathalie comme une friandise offerte à laquelle je décidais de ne pas toucher.

***

Je retournai à la boîte de raviolis sans trop y prêter attention. C’était mauvais, mais les petits coussinets farcis de vieille carne comblaient l’abysse dans lequel j’aurais pu sombrer. Un deuxième signal vint interrompre ma mastication. « Nath » insistait. « Xavier? Je te vois en ligne. Dis-moi tout de suite si tu n’es pas intéressé, que je passe à autre chose. » Pas intéressé, tu parles. Malgré tous les garde-fous que j’avais érigés, j’étais déjà épris.

Je me versai un verre de whisky bon marché pour me donner du courage. Je le dégustai en faisant les cent pas dans mon appartement dont la circonférence n’en comptait pas vingt-cinq. L’alcool me réchauffa le ventre puis les tempes. Un deuxième verre, signant la mort de la bouteille, me ragaillardit. J’avais décidé d’être un salaud, j’allais m’y tenir bon sang! Je n’allais pas flancher à la première donzelle!

Sans me rassoir, je tapai rageusement sur mon clavier: « Bonjour Nathalie. Heureux de vous lire. » Le vouvoiement était de circonstance. Rester distant, avais-je lu, était l’ingrédient principal d’une prédation réussie. Il exacerbait le mystère que je n’avais jamais su préserver: dans la vraie vie, j’étais un livre ouvert.

La fille était rivée à son écran. Elle dégaina sa réplique suivante dans la seconde: « Ah, vous êtes vivant. Alors, ce rendez-vous? J’ai hâte! »

Tout dans mon corps et mon esprit me dictait d’embrasser son langage, de baisser les armes et d’aller sur le champ rencontrer cette formidable irruption. Je me fis à nouveau violence. « Hâte? Mais nous avons toute la vie, Nathalie. Si vous voulez bien être mon guide. » Je regrettai immédiatement cette référence idiote à Bécaud. On la lui avait sans doute servie et resservie. « Ha ha, avec plaisir. Et j’adore la chanson. »

Chaque réponse me prenait de vitesse, me laissait pantois par sa spontanéité, son aisance. N’était-il pas prévu que je séduise une dinde, que j’en joue un moment, lui faisant miroiter un eldorado de fille vaniteuse, avant de l’abandonner sans scrupule sur le bas-côté de sa vie insipide? Le marionnettiste, c’était moi! « Je ne vois pas de quelle chanson vous parlez », tentai-je, sans bien saisir quelle arme je brandissais.

La réplique se fit attendre. J’avais décontenancé la disserte Nathalie. Le silence de ma kitchenette me redonna de l’aplomb. Jetant un œil à la conserve entamée, je me surpris à y déceler des grives plutôt que des merles. J’avais retrouvé un peu de superbe.

Il s’écoula deux longues minutes avant que je ne reçoive le prochain message. « Pardon, cela m’apprendra à vouloir faire de l’esprit. » Nathalie s’excusait. C’était une première victoire, la preuve que Xavier avait de l’ascendant. « Vous êtes bien taiseux, cher Xavier. Je suis intriguée. » Elle avait renchéri avant même que je réponde. Je tenais le couteau par le manche, définitivement. Et c’était l’heure d’asséner le premier coup. « Je suis à l’étranger en ce moment. Je ne peux pas vous rencontrer dans l’immédiat », lui répondis-je après avoir laissé passer 60 interminables secondes.

***

Je refermai mon laptop d’un coup sec, pour assurer à ma réponse formaliste un temps de latence. Je mordillai ma lèvre inférieure sur laquelle je sentis naître un sourire. Le pouvoir avait bon goût. Mais il fallait déjà que je songe à la suite. Nathalie avait cueilli Xavier avant qu’il ne soit mûr, il y avait donc des détails à repenser.

Pour elle, nous habitions le « même coin », sauf qu’évidemment j’avais menti. Si je voulais la rencontrer physiquement, il faudrait compter au moins quatre heures de route. Et puis, je n’avais jamais mis les pieds dans la ville méditerranéenne où je prétendais vivre. Me vint alors l’idée d’un endroit neutre pour ce rendez-vous. J’étais à l’étranger. Donc je pouvais lui proposer de m’y rejoindre.

Un frisson me parcourut l’échine au moment d’ouvrir mon ordinateur. M’avait-elle récrit? Était-elle encore à ma merci? En découvrant ma page d’accueil, je me figeai. Je n’eus pas le loisir de me réjouir des quatre messages de Nathalie. A leur suite s’ajoutaient ceux de Valérie, d’Anna et de Capucine. Xavier était un piège efficace.

J’avais pris le temps d’éplucher soigneusement le profil de Nathalie. Les trois autres n’eurent droit qu’à une lecture en croix. Venues après, elles héritaient naturellement des prénoms 2, 3 et 4. Et tout portait à croire que la liste ne s’arrêterait pas là.

M’étirant sur ma chaise, je fus pris d’un vertige. Pour la première fois de ma vie, j’allais éconduire plutôt qu’être éconduit.

L’idée me plaisait. Fomenter la réponse qui laisserait 2, 3 et 4 inconsolables était jouissif. Mes arguments étaient cruels, incisifs: trop fluette pour s’accorder à ma stature, un peu âgée pour que l’on puisse faire des projets, d’un niveau socioculturel trop différent pour accorder nos violons d’Ingres… Des décennies d’échecs amoureux m’avaient fait passer maître dans le champ lexical du rejet.

Le nouveau signal émis par ma machine – qui me dévoila la photographie d’une certaine Johanne – me sortit de la semi transe dans laquelle le projet d’en découdre une fois pour toutes avec le sexe faible m’avait plongé. Je réalisai que la facilité avec laquelle Xavier moissonnait ce site de rencontre était vexatoire. Si j’obtenais parfois une ou deux réponses à mes sollicitudes virtuelles, c’était un maximum.

Allait-il vraiment falloir que je réponde personnellement à toutes ces sirènes? Puisant dans mes souvenirs amers, je me souvins que les rejets les plus douloureux étaient en fait des silences. Je décidai alors de jeter sans un mot aux oubliettes ces prétendantes anodines – sauvegardant toutefois leurs messages afin d’en nourrir mon tableau de chasse – et de me concentrer sur Nathalie.

***

Cette dernière ne donnait plus signe de vie. Ses quatre derniers messages n’avaient pas reçu de réponse depuis quinze minutes, mais le « suis-moi je te fuis » ne semblait pas avoir sur elle la prise escomptée. Je lui soumis ma proposition de rendez-vous qui l’obligerait à se déplacer. Sa réponse fut rapide mais moins enthousiaste que je l’aurais souhaité. « Finalement, nous pouvons attendre, en effet. Je vous verrai à votre retour en bord de mer. »

Mon moi profond admit cette proposition sans broncher. Elle ne me rejetait pas, elle repoussait simplement le moment où nous pourrions nous étreindre. Ce n’était pas l’avis de Xavier. Je sentis monter en moi une rage sourde. Il n’était pas homme à se laisser dicter un calendrier. Et en aucun cas par une femme. Je le laissai prendre le dessus, tant il m’était agréable d’occuper ses vêtements.

« Je ne sais pas quand je serai de retour. Votre hâte s’est-elle déjà volatilisée? Dommage, car elle m’avait contaminé. Pour moi, c’est maintenant ou jamais. » Mon empressement nouveau refroidit Nathalie. Je le sentis à sa réplique, où elle justifiait de façon vaseuse une impossibilité de se déplacer, de soudains impératifs qui la clouaient sur place. Bref, une perte d’appétit palpable. Qui était peut-être motivée par mon étrange revirement. J’avais été imprudent, quitte à perdre en crédibilité. Sans doute parce que je ne maîtrisais pas les codes de ma nouvelle identité. Xavier gonflait en moi avec assurance mais le perdant que j’étais tenait encore la barre.

Il était urgent d’adoucir un peu l’approche, pour amadouer cette proie qui m’était, au fil des mots, devenue indispensable. J’étais en train de perdre Nathalie. Elle se rebiffait. Y renoncer creusait en moi un manque angoissant.

« Chère Nathalie, laissez-moi écourter mon voyage. Il me tarde de vous voir, d’échanger avec vous de vive voix. Votre hâte est communicative. Je serai demain matin où il vous plaira. » Nathalie se murait dans un mutisme insoutenable, alors que crépitaient les notifications annonciatrices de nouvelles captures, que j’écartais rageusement de mon écran.

***

J’avançais sans filet, je le sentais. Le danger mettait mes sens aux abois. Une odeur rance de sauce tomate industrielle frappa mes narines. Le trafic vrombissant dérangeait mon cerveau, les mouettes rieuses du tableau que je m’étais dépeint riaient maintenant de moi et l’opacité de mes vitres sales augmentait la grisaille épaisse dans laquelle j’évoluais.

Dix minutes s’écoulèrent où la bataille intérieure que se livraient mes deux identités me colla un puissant mal de crâne. Je pris un cachet avec l’espoir superstitieux que cela disperserait les brumes. Fébrile, je vérifiai ma connexion. Elle ne pouvait tout de même pas cesser net notre échange!

Le signal qui retentit résonna avec fracas dans ma boîte crânienne. Un rapide coup d’œil à mon ordinateur me renseigna sur le fait qu’il n’y était pour rien. C’est à ma porte qu’on sonnait.

Médusé, je peinai à me lever. Je n’attendais aucune visite. Le temps que je mis à me déplacer jusqu’à mon entrée fut assez long pour que plus personne n’y demeure. Je courus à ma fenêtre pour tenter d’apercevoir l’importun, mais au lieu d’individus, je ne vis que la foule.

Cet amas grouillant et anonyme me renvoya à mon insignifiance. Xavier avait mis les voiles, emportant avec lui sa collection d’art, ses rentes et sa superbe. J’avais créé un usurpateur si patenté qu’il avait réussi à me flouer. J’étais le docteur Frankenstein à qui sa créature venait d’échapper.

Pour retrouver un semblant de calme et réunir ce qu’il restait de moi, je relus le long curriculum vitae que j’avais rédigé avec gourmandise et hostilité le matin-même. Ça claquait! Cet homme avait tout. La fortune, le goût, la liberté et, comme j’avais pu le constater en quelques heures, toutes les femmes qu’il pouvait désirer. En fait, je m’étais fondu dans la personne que je haïssais le plus. Bien plus encore que toutes ces femmes que j’avais aimées sans réciproque.

La trombine de Nathalie réapparut dans une petite fenêtre. Je l’avais presque oubliée. Elle me fixait rendez-vous le lendemain à midi dans un bar sur la plage. J’imaginai la déception que je percevrais sur son joli visage si je me rendais là-bas à la place de Xavier. Je croisai ma silhouette avachie dans la porte du four. Les années et la bière avaient fait leur oeuvre et transformé mon ventre tendu en polochon informe. Je ne ressemblais en rien à l’image que j’avais collée à mon profil d’utilisateur. Point de mèche romantique, de teint hâlé par les sorties en mer ou de montre gourmette. Je ne pouvais offrir que calvitie, pâleur et Swatch. A l’aube de mes 50 ans, j’avais raté ma vie.

***

Le cachet avait dissipé mon mal de tête et ma schizophrénie. Xavier envolé, je ne me sentais pas capable de mener à bien ce plan pourtant si bien étudié. C’était une nouvelle pierre que j’allais devoir mettre dans le jardin de mes échecs.

Dans mon apitoiement, je n’entendis pas tout de suite que l’on sonnait à nouveau. Et que l’impatience avait maintenant adjoint à la sonnette des tambourinements soutenus.

Était-ce Nathalie, qui par une prouesse d’informaticienne avait dégoté mon antre à partir de mon adresse IP?

Arrivé derrière ma porte, je me maudis de n’y avoir finalement pas installé ce Judas il y a quelques années. Encore un projet avorté. Le cœur battant la chamade, la gorge nouée, j’allais ouvrir quand je réalisai que je ne portais qu’un vieux caleçon déshonorant. J’enfilai un pantalon et un t-shirt plutôt propres et respirai profondément.

Là, devant moi, se tenait Xavier. Je le dévisageai de ses souliers vernis à son col blanc soigneusement boutonné. Un léger parfum de vétiver et une assurance exaspérante émanaient de son mètre huitante-cinq qui le faisait me regarder de haut. Etonnamment, j’accueillais la possibilité de son existence de manière stoïque.

« Vous êtes électricien, c’est juste? » me lança-t-il, m’extirpant d’une torpeur qui semblait avoir duré plusieurs heures. « Je suis votre nouveau voisin, et mes plombs ont sauté. »

« Laissez-moi enfiler des chaussures et je vous rejoins. Quel appartement? » réussis-je à répondre sans ciller. Mon sang-froid me surprit. Je refermai la porte et écoutai s’éloigner mon avatar. De retour dans la cuisine, je pris le temps de répondre à Nathalie. « Je serai là à midi tapant, et je m’en réjouis beaucoup. »

Je refermai mon ordinateur et chaussai des baskets. Ma boîte à outils dans une main, mes clés dans l’autre, je claquai la porte derrière moi. Dans les escaliers qui menaient au loft de Xavier, évidemment situé dans la surélévation moderne de notre vieil immeuble, je me plus à imaginer la mine déconfite de Nathalie après une heure d’attente, trois Spritz et la certitude de s’être fait duper. Je souris à ma propre perversité.

Je sonnai à la porte de Xavier, enfilant le masque du bon voisin prêt à rendre service. Nathalie allait devoir attendre, j’avais une nouvelle victime.

Commentaires (2)

Starben CASE
27.06.2022

Une histoire cynique et drôle avec ce léger malaise de constater que le personnage de l'électricien est très réaliste... et l'avatar aussi. Chapeau!

Cecile Collet
27.06.2022

Merci! L'électricien est aussi réaliste qu'une certaine buraliste!

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