Créé le: 23.11.2022
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La Rate et le Thymus

Fables

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Deux organes méconnus prennent la parole. Ils en ont gros sur la patate.
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La Rate en détresse élève une plainte qui touche le Thymus.

« J’ai le spleen, dit-elle. On me prend pour une championne de la bonne humeur, pour une rigolote qui se dilate aux blagues les plus lourdes. Faux ! Je suis le cimetière des globules rouges. Ces pépites de joie viennent s’éteindre dans mes plis. Je suis la fossoyeuse du sang. Un chant funèbre résonne en moi jour et nuit. Ce n’est pas tout ! Dans l’abdomen, suis-je à ma place ? On m’appelle l’Étrangère. L’estomac, les intestins, le foie me reprochent de boire en suisse, de ne pas contribuer à la Digestion qui est, prétendent-ils, la tâche qui unit les organes, la première loi du vivre-ensemble. Les reins me snobent. Du fait qu’ils purifient le sang, ils se jugent supérieurs à moi qui lui donne sépulture. Quel ennui dans l’abdomen ! On m’ignore. C’est seulement quand un boxeur m’éclate que mes cris vont secouer un peu mes voisins. Je ne sais pas à qui parler, très haut Thymus, alors à tout hasard je m’adresse à toi. Comment vas-tu ? »

Et le Thymus de répondre : « Pas mieux loti que toi, Rate infortunée ! Il est loin le temps où Galien faisait de moi le siège de l’âme… Mon rôle dans la maturation des lymphocytes T est tellement complexe que je passe pour un algébriste incompréhensible. Si je te dis que mon cortex opère une sélection positive puis négative des thymocytes double-positifs, franchement, y piges-tu quelque chose ? Et j’ai le blues, parce que je me ratatine. À la puberté, je pesais 35 grammes. Maintenant que j’ai 70 balais, je ne pèse plus que 6 grammes… Tu sais quoi, la Rate ? Nous deux, nous sommes les minorités invisibles, celles que le Corps préfère cacher. Ta poésie baudelairienne et ma philosophie élitaire déprécient les lois d’une physiologie humaine qui se rêve un peu trop sucrée. »

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