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Tous les malheurs qui le frappaient depuis quelque temps étaient certainement imputables à la statue maléfique qu'il avait ramené de Bali.
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La malédiction de la statue balinaise

Depuis des mois, Stéphane n’en voit pas le bout. Une tuile après l’autre et comme si ça ne suffisait pas, il vient de recevoir une baisse de salaire avant de carrément se faire virer de son travail pour un malentendu difficile à corriger. Sa voiture est chez le garagiste qui lui demande une somme folle pour la réparation et il va devoir l’abandonner. Nous sommes dans le salon à trier le malheur et tenter de retrouver la positive attitude.

Soudain, je sens un regard. Stéphane l’a senti également et il lève lentement la tête pour le rencontrer. La Statue nous regarde. Je me force un peu à rire et lui demande s’il veut un verre de vin. Il m’a dit en début d’année, qu’il pensait que cette statue rapportée de nos vacances à Bali portait malheur. Je dois admettre que je suis contaminée par sa superstition et que je cherche, depuis quelques semaines à me débarrasser de la Statue. Si effectivement elle porte vraiment malheur, un esprit doit l’habiter, et je ne peux tout simplement pas la jeter dans le premier container, à moins qu’il soit en partance pour Bali. Quelle bonne idée ! La renvoyer à Bali. Mais où ? Quelques jours après, je croise une amie, qui habite justement Bali et qui reste en Suisse quelque temps. Nous nous retrouvons et c’est avec un grand espoir que je lui demande si elle veut bien reprendre la Statue au pays. Un peu embarrassée, elle me rétorque que cela n’est pas possible et me laisse plantée là, figée dans l’élan de notre conversation. Qu’à cela ne tienne, je trouverai une autre solution.

Une idée peu à peu se fait jour : la destination idéale pour mon hôte indésirable serait un temple balinais. Ma décision est prise : surfer un moment sur le net, trouver l’adresse d’un beau temple avec vue sur la mer et y expédier ma statue avec un mot d’explications. Bon, vu le poids de cette oeuvre, ça va me coûter un saladier, mais le bonheur est à ce prix.

Malheureusement, les temples ne laissent pas leurs adresses sur les ondes…. Et les malheurs continuent à s’accumuler.

Les vacances approchent et des amis nous invitent sur leur voilier, en Sicile. Cela me réjouit, malgré mon problème, devenu une véritable obsession dont Stéphane ne soupçonne même pas l’existence. Je ne veux surtout pas en rajouter et le confirmer dans ses impressions néfastes. En préparant les valises, la solution fait enfin surface : je n’ai qu’à envoyer symboliquement la Statue chez elle. Après tout, l’océan, la mer, l’eau… tout cela, c’est la même flotte. Il suffit de jeter la Statue à la mer et elle trouvera bien son chemin pour Bali, si elle est si puissante. C’est même une noble action envers cet esprit maléfique qui nous pourrit la vie depuis des mois! J’emballe soigneusement la Statue et la glisse dans les bagages. J’y ajoute un petit mot pour la quitter à l’amiable.

Plus vite dit que fait, car un sur un voilier qui mesure 13 m, agité en permanence par des vagues, des apéritifs foireux et des vents contraires, il est difficile de trouver le moment de recueillement et de solitude nécessaire l’accomplissement de cette sacrée mission.

Pas un jour ne passe, sans que j’y pense, que je guette le moment opportun. Finalement, à force d’être désagréable, les membres de l’équipage me laissent bouder à l’arrière et m’oublient. Est-ce que bien le moment, le lieu, l’heure? Des doutes m’assaillent comme si la Statue résistait. Puis dans un geste ému et grandiose, je lance le précieux paquet à la mer en récitant ce que je pense être les mots-à-dire-en-pareilles-circonstances.

Un grand soulagement m’envahit, ma gaieté revient, la vie est belle et me rend à mes amis, qui n’y comprennent rien. Le soir, dans l’intimité de notre cabine, j’annonce, avec une pointe de fierté, à Stéphane que désormais il n’aura plus de soucis, le malheur est derrière lui. Devant son air perplexe, je lui relate l’aventure. Partant d’un grand éclat de rire, il me dit:

– Mais ce n’était pas de cette statue que je parlais. Il y a longtemps que je m’en suis débarrassée de celle-là!

Devant mon air déçu, il ajoute:

– Mais tu as bien fait de t’en débarrasser. Après tout, on ne sait toujours pas laquelle des deux portait malheur.

La morale de cette histoire: pendant les vacances, faites attention à ce que vous ramenez chez vous!

Toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existé est possible et même très probable.

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