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Au début du monde, tous les animaux se sont trouvés face à leur destin. Ils ont parfois du chercher de l'aide et faire avec celle qu'ils ont trouvée. Cette histoire raconte comme celle qui fût Gazelle-À-La-Robe-Chatoyante donna ses couleurs au feu avant de devenir Gazelle-Cendrée, la poétesse du début du monde.
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Au début du monde, lorsque l’esprit qui préside aux destinées de tous les êtres vivants donna naissance à Gazelle, celle-là reçut une magnifique robe blanche, colorée de larges plages de beiges, de jaunes et d’orange rougeoyants, de rouges merveilleux. De cette robe, qui faisait l’admiration de tous les autres animaux, elle tira son nom de Gazelle-À-La-Robe-Chatoyante.

Gazelle-À-La-Robe-Chatoyante forçait le respect de ses camarades non seulement pour la splendeur de sa robe, mais également par sa tenue et son comportement: elle montrait de l’empathie et de l’attention pour ses semblables, écoutant chacune et chacun, leur apportant réconfort et chaleur et leur offrant nourriture et eau lorsque le besoin s’en faisait sentir. Comme Gazelle-À-La-Robe-Chatoyante s’occupait bien de celles et ceux qui venaient lui demander de l’assistance, cela se sut loin à la ronde et de plus en plus d’animaux qui ne trouvaient pas le confort nécessaire à une position favorable au développement harmonieux de leur existence -ni de quoi soulager leur soif ou calmer leur faim- venaient régulièrement la trouver pour combler le manque qui les tenaillait. A force, Gazelle-À-La-Robe-Chatoyante ne put faire face à ce flot de demandes en constante croissance et elle se dit qu’il lui fallait demander de l’aide extérieure.

 

Gazelle-À-La-Robe-Chatoyante s’en alla alors trouver Raton-Laveur pour lui demander de bâtir une grande maison dans laquelle elle pourrait recevoir ses amis dans le besoin et, avec l’aide de Serpent et de Dindon, pourvoir à de la nourriture pour tous. Raton-Laveur lui répondit qu’il était suffisamment occupé avec ses propres affaires et qu’il n’avait malheureusement pas de temps à mettre au profit de ce projet -au demeurant, selon lui, fort noble et bien généreux. Serpent refusa en prétextant qu’il faisait fuir les autres animaux et que de ce fait, sa présence au sein de ce projet serait contre-productive. Quant à Dindon, il fit semblant de ne pas comprendre la requête, arguant que le seul langage qu’il entendait était le glou-glou.

Gazelle-À-La-Robe-Chatoyante se tourna ensuite vers les vents qui soufflaient alors sur les plaines, qui avaient pour noms Oryax, Ouryaxis, Zenel et Nadiramus, et leur demanda s’ils pourraient construire une maison assez grande pour qu’elle y reçoive ses amis, ainsi que de pourvoir à la nourriture qui leur était nécessaire pour récupérer la force qui leur faisait défaut. Les vents répondirent qu’ils ne pouvaient participer à son entreprise, trop occupés qu’ils étaient à la poursuite de leurs propres tâches: Oryax façonnait les dunes des déserts qui étaient en train de naître, Ouryaxis lavait inlassablement de son souffle puissant les plaines de l’Ouest pour préparer les pâturages à venir, Zenel s’assurait de faire grandir les glaciers du Nord pour permettre aux habitants des contrées froides de s’y installer et Nadiramus ayant mangé trop de piments, il ne pouvait plus souffler sur quoi que ce soit sans y bouter instantanément le feu.

Gazelle-À-La-Robe-Chatoyante se tourna alors vers le Ciel, la Terre et les Océans et les implora de lui venir en aide, ainsi qu’à ses amis qui dépérissaient à vue d’œil. Tous trois se fâchèrent très fort: “Comment oses-tu nous déranger dans notre œuvre de création avec tes problèmes insignifiants!? Débrouille-toi donc toute seule avec tes amis et ne viens plus nous déranger!”.

Gazelle-À-La-Robe-Chatoyante était désespérée. Comment se faisait-il que toutes ces puissantes entités, pour lesquelles répondre à sa demande ne demandait quasiment aucun effort, refusaient de l’aider? Elle se coucha sur le sol et se mit à pleurer toutes les larmes de sa raison. Elle pleura, pleura, tant et si longtemps que le Feu lui-même entendit sa tristesse et fût pris de compassion pour elle. Il vint alors près de Gazelle-À-La-Robe-Chatoyante et lui dit:
– Si tu le désires, je peux t’aider.
– Ah oui, répondit Gazelle-À-La-Robe-Chatoyante entre deux sanglots étouffés? Tu veux bien construire cette maison et apporter l’eau et les victuailles nécessaires à mes amis?
– Oui, dit Feu, je le veux bien. Mais pour cela, il faut que tu me donnes ta belle robe, car je n’ai pas de couleur et je veux bien porter celles magnifiques que tu revêts.
(A cette époque, le feu n’avait pas de couleur, il n’était que blanc et noir. Je sais, c’est dur à admettre, mais c’est ainsi).
– Très bien, répondit Gazelle-À-La-Robe-Chatoyante. C’est tout ce que je possède et je veux bien t’en faire cadeau pour que tu sauves mes amis.

Feu s’approcha alors de Gazelle-À-La-Robe-Chatoyante et se mit à la lécher pour lui prendre petit à petit ses couleurs, celles qu’ont aujourd’hui ses flammes quand nous le regardons. Une fois les flammes de Feu colorées, il ne resta sur Gazelle que les cendres de sa robe consumée. Gazelle se releva et s’ébroua; elle vit alors tout autour d’elle une immense forêt remplies d’arbres à fruits, traversée et arrosée par de multiples ruisseaux et rivières; un havre où ses amis allaient enfin trouver réconfort et satiété. Elle remercia Feu et s’en alla tout en haut d’une montagne pour y écrire des poèmes à la gloire des pins nourriciers et des cascades de jouvence.

Et c’est depuis ce jour que Gazelle-À-La-Robe-Chatoyante, ayant donné au feu ses couleurs incomparables, est devenue Gazelle-Cendrée, la poétesse du début du monde.

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