Créé le: 01.10.2016
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Cadillac….

Polar

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© 2016-2024 Victor Hublot

Bonjour, voici un texte que j'ai écrit spontanément. J'espère qu'il vous plaira...
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Mario leva le nez, et regarda le numéro 255 sur la plaque de marbre au-dessus de la porte de l’hôtel particulier.

C’est bien là, se dit-il, en appuyant sur l’interphone à côté du nom de la femme qui l’avait appelé, un nom difficile à prononcer : Duquésnel-Charbonnières. A-t-on idée de s’appeler comme ça ?

Dans la cour intérieur était garée une magnifique Cadillac rutilante qui semblait sortir d’usine, bien qu’elle ait été fabriquée dans les années 50. Mario connaissait bien ce modèle et resta bien cinq bonnes minutes à la regarder avant de se rappeler qu’il était attendu par Madame Duqué-machin, comment elle s’appelait, déjà ?

C’est une femme élégante qui lui ouvrit en lui disant d’entrer.

-bonjour cher Monsieur, merci d’être venu, je vois que vous avez apprécié la Cadillac

– elle est magnifique, un jour je m’en achèterai une pareille, j’ai un copain qui travaille à la démolition et ….

– Je vois, mais dites-moi, si elle vous intéresse autant, peut-être pourrions-nous nous arranger

ah bon, elle est à vous ? Vous la vendez ?

– oui et non, en réalité, c’est celle de mon mari. Il l’a achetée un jour un peu sur un coup de tête et l’utilise très peu. Et moi, elle ne m’intéresse pas vraiment, trop difficile à parquer.

– ah ça c’est dommage, moi si j’en avais une pareille, je roulerais tous les jours avec, c’est sûr! Pour l’instant, j’ai une Toyota, mais un jour je vais en avoir une pareille. Mais vous m’avez dit que si ça m’intéresse, on peut s’arranger, ? Votre mari serait prêt à la vendre ? Pas trop cher quand même.

– Non, il ne veut pas la vendre, c’est le problème, mais je me dis que si le propriétaire actuel disparaîssait, le problème disparaît aussi, et vous pourriez devenir le nouveau propriétaire, en échange d’un petit service, si vous voyez ce que je veux dire…

– Qu’est-ce que vous entendez par “disparaîssait” ?

– il pourrait avoir un accident, et vous pourriez …. l’aider, vous comprenez ?

– euuuh, je… vous…. je devrais le …..?

– quand vous être entré ici, j’ai tout de suite remarqué que vous avez la trempe d’un Al Capone, et la classe aussi. Vous le portez sur vous.

– ah booon ?

– Et cette voiture de collection est faite pour vous. Je vous verrais très bien au volant. La classe, je vous dis.

– vraiment ? C’est vrai que j’adore les voitures, et…

– alors voici ce que je vous propose, je lui dis que j’ai trouvé un acheteur potentiel, un vrai connaisseur et un amateur de choses de valeur, ce que vous êtes d’ailleurs. Alors je vais le convaincre de vous rencontrer, malgré ses réticences à la vendre, si je lui fais croire que vous êtes prêt à payer, disons, 300000 euros pour l’avoir. Vous vous arrangez pour vous retrouver dans un endroit désert, la nuit et vous lui faites son affaire. Je m’arrangerai pour faire croire à un crime de rôdeur. Ensuite, en pauvre veuve éplorée, je mettrai la voiture de mon malheureux défunt mari en vente, parce que ce serait trop dur pour moi de la garder après ce drame terrible.

– vous allez la vendre ? Mais vous m’avez dit qu’elle serait pour moi…

….Décidément ce type est vraiment un démeuré..!

– Attendez, attendez! Officiellement je la vendrai, mais en réalité, je vous la donne, nous faisons un faux certificat de vente, et personne ne trouvera rien à redire.

– Trop génial! Comment on fait alors? On y va tout de suite ?

– je vois que nous allons faire une bonne affaire, vous et moi. Mais pas si vite. Ah, j’oubliais, j’ajoute une petite enveloppe….pour vos frais…

Sur ces derniers mots, elle lui indiqua une petite mallette posée par terre dans un coin.

– c’est pour moi?

Et sans attendre la réponse, il s’en empara et l’ouvrit tellement fébrilement que le contenu se répandit par terre. Ce contenu consistait en une certain nombre de liasses de billets. Sans pouvoir en donner un montant exact, Mario se dit qu’il n’avait jamais eu une telle somme d’argent. Tout aussi fébrilement, il ramassa les billets et les remit maladroitement dans la mallette

– j’aimerais juste récupérer cette mallette quand tout sera terminé, ça a l’air un peu bête, mais c’est sentimental…

– oui, bien sûr, je vous la rends dès que c’est possible

– C’est parfait, je pense que nous pouvons organiser cela pour la semaine prochaine, je vais parler à mon mari pour qu’il prenne rendez-vous avec vous. Je suis contente d’avoir trouvé un homme fort et à la hauteur. Je vous recontacte quand notre plan pourra être mis à exécution. En attendant, je compte sur votre discrétion et je vous raccompagne.

– « oui, oui, non, je dirai rien à personne », dit-il en sortant. Il manqua de se prendre les pieds dans le tapis et de s’étaler par terre en quittant le luxueux appartement.

Elle ne tourna même pas la tête en direction de l’homme qui venait d’entrer dans la pièce,  quand elle lui dit : “Tu vois, ce qu’il y a de bien avec ce genre de types, c’est qu’ils sont tellement stupides et imbus d’eux-mêmes, que si tu les flattes un peu, ils sont prêts à gober n’importe quoi. En plus, cet idiot a reçu de l’argent, et ça le rend encore plus malléable. Tu as déjà remarqué que quand quelqu’un a de l’argent liquide en main, il le considère comme à lui, et pour rien au monde ne voudra le rendre, et par conséquent va accepter n’importe quoi pour le garder. Cerise sur le gâteau, il a même oublié de demander pourquoi je lui ai demandé de venir, je n’ai même pas eu besoin de lui raconter des bobards “.

– mais où as-te déniché un crétin pareil? J’ai déjà vu pas mal d’abrutis, mais celui-ci est vraiment hors normes”.

– c’est mon fils qui fréquente parfois des drôles de personnages, et il m’a une fois parlé de ce type qui l’avait dépanné avec une histoire de voiture, ou je ne sais plus quoi. Peu importe, il me fallait un simplet qui ne se pose pas trop de questions, et celui-ci est exactement ce qu’il me fallait.

– d’accord, alors comment comptes-tu t’y prendre?

– je vais effectivement convaincre Henri que ce crétin est prêt à payer une fortune pour cette voiture, et que l’emmener faire un tour ne l’engage à rien. Le type va liquider Henri dans un endroit désert tard le soir, j’ai pensé à la forêt, la route passe juste à côté. Donc, une fois qu’il aura supprimé Henri, je mets la police sur sa piste, et quand ils trouveront ses empreintes sur la mallette avec les initiales de Henri qu’il a promis de me rendre, ils vont sérieusement s’intéresser à lui. Il faudra aussi qu’il explique comment il s’est retrouvé dans sa voiture, parce que tu te doutes bien que je vais oublier de lui faire le certificat de vente..

– J’avoue que tu es redoutable, apparemment tu as tout prévu, et les gens ne vont pas s’étonner de nous voir ensemble, après tout, c’est normal que tu voies régulièrement ton avocat, après ce qui est arrivé.

-tu as tout compris, mon Victor chéri.

2 semaines plus tard, mercredi 23 octobre à 8:45 :

Madame Marie-Cécile Duquel-Charbonnier ?

Duquésnel-Charbonnières, oui c’est moi. Que puis-je pour vous ?

Je suis le commissaire Maigrelait, dit l’homme en tendant sa carte, puis-je vous parler ?

Certainement, mais que se passe-t-il ?

Nous avons retrouvé une Cadillac El Dorado rouge abandonnée sur la route, c’est bien la votre ?

C’est celle de mon mari, abandonnée, dites-vous ? Il n’y avait personne à l’intérieur ?

Oui et non, disons qu’il n’y avait personne ….de vivant. Pour tout vous dire, il y avait un cadavre dans le coffre !

Mon dieu, c’est affreux !

Certes, et j’aimerais que vous m’accompagniez pour nous dire si vous connaissez le cadavre.

Arrivés sur place, elle reconnut la Cadillac rouge de Henri autour de laquelle s’affairaient des agents de la police scientifique. L’un d’eux prenait des photos sous tous les angles. Le coffre était ouvert et un corps était étendu sur une civière recouverte d’un drap. Le commissaire releva le drap pour découvrir le visage du macchabée. En découvrant le visage, elle eut un mouvement de recul qui n’échappa pas au regard habitué du policier.

vous connaissez cet homme, Madame ?

Euh…non, non pas du tout, je ne l’ai jamais vu.

Pourtant vous avez l’air choquée en voyant cet inconnu.

C’est que…. je n’ai jamais vu un cadavre auparavant, vous comprenez

je comprends…

Le commissaire comprenait, mais ce que Marie-Cécile eut de la peine à comprendre, c’était pourquoi le corps découvert dans le coffre de la Cadillac n’était pas celui de Henri Duquésnel-Charbonnières, mais celui de Victor, son amant……

9 heures plus tôt, mardi 22 octobre à 23:25 :

Mario joua avec les clés de la Cadillac que Mme Dumachin-Charbonneau lui avait données pour accomplir ce qu’il fallait bien appeler un crime. Tout était prêt, il avait pu se procurer une arme dont le numéro avait été effacé et qu’il allait jeter dans la rivière après. Il avait la voiture à disposition, avant qu’elle lui appartienne officiellement. C’était vraiment un bon plan !

Mais il fallait encore régler un dernier détail avec Victor.

Après tout, Victor était dans le coup, même s’il ne devait pas se mêler du plan.

Mais il fallait qu’il voie Victor.

La maison de Victor n’était pas aussi luxueuse que celle de Marie-Cécile, mais c’était pas mal quand même, avec des colonnes grecques ou romaines, enfin, un truc du style. Mario était un expert en voitures, pas en architecture. Il sonna à la porte de Victor.

Quand Victor lui ouvrit la porte, il eut l’air surpris, surpris et inquiet aussi. Qu’est-ce que cet imbécile venait faire ici ? Il était sensé aller assassiner Henri ce soir, pas débarquer ici ! Il n’était même pas sensé connaître Victor !

-que… qui êtes-vous ? que voulez-vous ?

– Je viens de la part de Madame Marie-Cécile, j’ai un truc à faire pour elle, mais j’aurais besoin d’un coup de main.

-Pardon ? Mais qui êtes-vous?

Victor ne comprenait plus rien, pourquoi Marie-Cécile a parlé à ce Mario de lui? Elle lui a donné son adresse ? Tout ça n’a aucun sens !

– Je ne pourrai pas faire le travail ce soir, sauf si vous m’aidez, je dois aller me chercher quelque chose, et la personne ne me le donnera pas à moi. Si vous lui demandez il va vous le donner, parce qu’il vous connaît pas.

Victor essaya de réfléchir, mais tant pis, tout ça était trop confus, il réfléchira en route.

Mario s’assit fièrement au volant de la Cadillac et Victor prit place à côté de lui.

Ils prirent la route qui longeait la forêt, là où il fallait « s’occuper » de Henri. Mario arrêta la Cadillac au bord de la route. Victor commençait à devenir vraiment nerveux.

«qu’est-ce que vous faites? Pourquoi on s’arrête ici ?» demanda-t-il, sur ses gardes.

Mario n’avait pas que ça à faire, pas le temps de discuter des heures. Il se contenta de sortir l’arme (dont le numéro avait été effacé et qu’il devrait jeter dans la rivière après), et tira 4 balles en direction de Victor, qui n’eut pas vraiment le temps de comprendre ce qui lui arrivait. Victor s’affaissa sur le siège, Mario sortit de la voiture, ouvrit le coffre puis la porte du passager, et transporta péniblement le corps de ce pauvre Victor dans le coffre, qu’il referma d’un coup sec.

Et voilà, le dernier détail avec Victor était maintenant réglé.

Quelques jours plus tôt, samedi 12 octobre à midi :

Mario regarda encore une fois la photo de Henri Duquésnel-Charbonnières.

Il l’avait vue des milliers de fois depuis que Marie-Cécil Dutruc-machin la lui avait donnée.

Maintenant il attendit dans sa Toyota que Henri sorte du restaurant où il avait l’habitude de manger. Mario aurait aussi pu entrer dans le restaurant pour approcher Henri, mais il ne savait pas pourquoi, il préféra attendre dehors.

Maintenant il vit à travers la vitre Henri qui se levait de table et mit son manteau avant de sortir. Henri releva son col, il faut dire qu’il faisait vraiment un sale temps, voilà une semaine qu’il ne s’arrêtait pas de pleuvoir. Ce déluge n’allait pas aider Mario à réaliser son plan, ou plutôt le plan de Marie-Cécile. Contacter Henri pour qu’il accepte de faire un tour avec cette Cadillac, et en plus il fallait qu’il laisse Mario l’essayer. Ce n’était pas gagné. Et si Henri refusait tout net, comment faire ? Tout le plan tomberait à l’eau.

Mais Mario n’était pas si bête que ça, même si Marie-Cécile le prenait visiblement pour un idiot.

C’est vrai, quoi, pour qui elle se prenait, cette pimbèche, dans son appartement huppé ? Soit elle était complètement inconsciente, soit complètement stupide. Elle fait venir un inconnu qu’elle ne connait ni d’Eve, ni d’Adam, et lui propose d’assassiner son mari, rien que ça ! Et en échange d’une bagnole ! D’accord, la bagnole est classe, une El Dorado de 1957 toute refaite d’origine, mais quand même, faut pas prendre Mario pour une bille.

Ca y est, Henri traversa la rue en direction de la Toyota de Mario.

C’était bien Henri Duquésnel-Charbonnières, celui de la photo. Celui de la photo, mais pas seulement, c’était avant tout Henri, ou Riri, comme Mario et les autres l’appelaient quand ils étaient au collège. Il faut dire que ça fait longtemps, mais Henri, ou Riri, il avait pas tellement changé.

Riri ouvrit la portière passager de la Toyota et s’installa à côté de Mario.

Mario avait aussi changé depuis le collège, mais Riri le reconnut sans difficulté.

– Sacré Mario, depuis tout ce temps ! Tu as bien fait de m’appeler. Qu’est-ce que tu racontes ?

– tu me croiras jamais, mais ta femme m’a appelé, et tu devineras jamais pourquoi!

– Ma femme ?

Effectivement, Henri eut de la peine à croire son pote Mario. A vrai dire, il ne l’aurait pas cru du tout si le le détective qu’il avait engagé ne lui avait pas montré les photos de sa chère Marie-Cécile au bras de son bellâtre de Victor. Encore un avocat marron qui a fait fortune en défendant des salopards qui payaient bien. Ah, elle s’est bien moquée de lui, après avoir profité de son argent, et en plus elle se paye le culot de rétribuer un tueur à gages avec sa propre voiture.

Et Mario, il l’avait tout de suite reconnue, la Cadillac que Hervé, le fils de Henri avait cabossée un soir où il l’avait « empruntée » sans demander à Papa. Hervé avait un peu picolé, alors il avait demandé à un de ses potes s’il connaissait un bon carrossier qui pourrait réparer cette petite bêtise. Ce pote dont le père travaillait dans le même garage que Mario. Mario avait accepté de réparer les dégâts et fait semblant de ne rien dire à Henri. Il faut dire que la réparation avait été bien faite, parce que Mario, il s’y connait en voitures, et il n’est pas si idiot que ça…

Pour le remercier, Henri lui a fait cadeau de la Cadillac dont Mario a toujours rêvé.

Commentaires (2)

Asphodèle
22.11.2016

Bonjour, j'ai eu beaucoup de plaisir à lire votre nouvelle. Elle est agréable à lire, drôle, bien rythmée et on se retrouve entrainé dans cette histoire rocambolesque sans même s'en rendre compte. J'aime bien l'utilisation de l'explication à rebours, ça s'enchaine vraiment bien, on ne s'y perd pas et finalement tous les éléments retrouvent leur places. bravo.

Pierre de lune
16.10.2016

Une histoire originale, sympa à lire, avec un bon effet de surprise ; l'argument de Mario pour attirer Victor dans la voiture est (certainement à dessein humoristique ?) est tout de même très très brumeux, non :-) ? Au plaisir de lire une prochaine nouvelle

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