Créé le: 28.08.2016
3736
0
2
Au sortir de la piscine
Allez, un petit bonjour en passant. Peut-être le début d’une histoire d’amour …
Reprendre la lecture
Au sortir de la piscine
Au sortir de la piscine, j’ai éprouvé une absence de frisson comme mes copains poissons. J’ai ôté mes lunettes, pris une douche, attentif à tous les corps étendus, je suis allé un peu plus loin asseoir le mien. J’ai fait des gestes vers le soleil blanc et des mouvements dans ma pensée, vers l’avenir et le passé, non comme un balancier, mais un toboggan de naufragés. On fêtait une architecture qui s’est imposée à nous sur l’instant voici longtemps, de mêmes espérances millimétrées qui épuisent les survivants. Les photographies évoquent silencieusement ce que nos regards aquatiques ne parviennent plus à saisir. Il y avait tout un été enfui à mes pieds mouillés que je n’osais plus poser. Le sol reverdit et se fait prometteur rien qu’à le fouler. Faire attention aux mouvements amples des épaules et à la circularité du temps dans cette ancienne configuration qui ne se lasse pas de nous lancer vers le vent. Qui serait triste n’aura pas sa place, pour autant qu’on le soit vraiment, et ne retrouvera pas ce qu’il s’obstine à chercher par abstraction d’un sien corps qui le suit.
Dans cette lente frénésie, vient le moment de parler de l’autre et même nature, meilleure, plus belle en chair et en vérité que celle qui maintenant se conçoit, née d’une imagination qui ne se fatiguerait pas. Tôt ou tard suffisamment, il sera temps. Oui, plus encore.
(28 août 2016 – On fêtait le cinquantième anniversaire de la piscine des Vernets à Genève, et j’ai nagé un peu ce matin)
L’Orgue de démocratie
Avec une secrète attention, me laisse entrer, une porte gigantesque qui s’ouvre devant un grand ciel sourd. Ne la regarde pas dans les yeux, mais songe, et ne t’en lamente pas, aux propos subtils de l’amie qui l’a trouvait belle et l’interrogeait. Porte de fer, orgue de démocratie, rouillée, musicale dans sa forme, sa matière, son impénétrabilité. Que dit-elle entre grincements lourds et longs ainsi que les silences ? Très belle et de prison, donc de violence et d’effroi, s’ouvre lentement, laisse passer, intimide, indiffère, paralyse, libère. Soupe de poisson.
Portail couché tout de musique et de verticalité, des orgues et des notes qui annoncent le béton libérateur des énergies venues de l’extérieur. «je resterai là, elle sera ma limite, Tracez une ligne rouge autour de moi: ma cellule», c’est insuffisant. Œuvre d’un artiste, années septante, en pleins ciels, dans les renouvellements, aises et malaises, spontanéité jadis, s’ouvre et se referme. Aller vers l’intérieur, y demeurer.
N’entrera plus aucun orgue de vie, sans espoir formel, quoi que ce soit, qui que ce soit. Traverser, frontière entre art et criminalité, un cimetière, une clinique. L’acier parle dans sa rouille qui l’empêche de crier. Aucun voyageur intéressé, que de lentes transitions, pour la vie ou pour un après-midi. Entendre avec les dents les tuyaux de cet orgue redoutable. Nous en sommes là. J’en reviens. « Très belle » ? Sans raison saisissable. Le béton se tait sans prendre la peine d’être ce qu’il est, ni de réduire à néant ce qui déjà, se trouve en cet état. Dans l’Etat.
(2 septembre 2016 – Ce que m’inspire le portail mobile, plus grand qu’une maison, artistiquement conçu et réalisé, de la prison de Champ-Dollon à Genève, que je franchis souvent depuis longtemps sans même le regarder ni me demander ce qu’elle y voyait)
Commentaires (0)
Cette histoire ne comporte aucun commentaire.
Laisser un commentaire
Vous devez vous connecter pour laisser un commentaire