Créé le: 15.09.2015
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Sans Titre, exprès
À toutes celles qui se sont développées sans référent identitaire masculin ou destructeur
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Sans titre, exprès
Une autre aube d’un autre matin. Sous la vie féconde de cet arbre, Isidora resta perplexe et pensive. L’espoir de vivre enfin était intarissable, malgré cette kyrielle infinie d’étapes et de méandres démultipliées par le joug de l’existence. Sa vie était comparable à une route en lacets dont les obstacles étaient à braver à chaque moment. Elle attendait l’instant t de la délivrance de ce fardeau. La vie lui avait fait comprendre que le monde extérieur ne la traiterait pas à sa juste valeur :
« Mon Dieu, merci chaque jour malgré la pesanteur de certains humains aliénés par leur servitude, s’exprima-t-elle, en admirant la découpe ciselée de l’orée du matin. »
Se donnant du courage, elle allait dans cette communauté qui cristallisait l’antagonisme par excellence de son éthique de vie. Son chemin de vie avait été tracé de la sorte, la patience et le sourire étaient ses plus fidèles alliées. Elle s’en accommodait par dépit, tant qu’elle pouvait.
Elle arriva en chemin, comme à son habitude. Il fallait veiller au grain du poulailler, le moudre avec précaution afin d’entretenir les poules. Elle se disait souvent que ce groupe irascible de femmes s’apparentait à ces mêmes animaux, et que cela serait même une insulte pour eux que de les comparer à elles. Ce n’est pas pour autant qu’ Isidora se laissait désarçonnée à la moindre occasion, elle parvenait même à créer des éléments éclatants et positifs émanant de chaque tâche à réaliser. Son équilibre était bien enraciné dans le sol. Elle le savait. Sa maturité état extrême. De ce fait, elles se plaisaient à la considérer comme une jeune enfant écervelée, à l’opposé de sa personnalité. Contrer leur perfidie tout en composant avec l’avarice de leur âme.
« Ta journée va être longue. Nous avons de nouveaux exercices qui t’attendent. »
Elles étaient d’une jalousie maladive. Prêtes à tout pour exploiter la moindre petite faille, la moindre petite erreur, aussi minimales soient-elles. Leur vice était à la taille de leur stupidité.
La déliquescence de leur être surgissait à chaque mot énoncé. Cela était monnaie courante dans leur monde peu élaboré. Elles avaient besoin de faire leur show, de s’ériger en faux modèle afin de satisfaire leur narcissisme exacerbé. Elles voyaient leur propre niaiserie à travers le prisme d’autrui. Incapables de savourer la moindre délicatesse, elles ne pouvaient s’empêcher d’émettre la moindre critique. Fades, insipides, sans saveur aucune, leur palais n’était capable de savourer que le fruit pourri de leur propre médiocrité. Leur avidité vénale paraissait de manière outrageusement sombre sous couvert d’une mise en scène montée à son paroxysme à chaque prétexte.
Il eût donc fallu répondre à de nouvelles exigences tordues. Encore et toujours. En dépit du bon sens. Faire résistance coûte que coûte dans cet univers de torture et de barbarie. Porter et traîner ces troncs d’arbres de l’autre côté de la rivière. Qu’allait-il se passer encore ?
Le balancement de ses hanches s’harmonisait avec le bruit de chaque écorce. Soudain, le mal fit son apparition. Leur technique ? Empêcher Isidora d’évoluer, de se développer et de grader dans cette communauté de femmes sans vertu. Elle s’y trouvait par erreur. Elles tentaient à chaque fois d’annihiler son courage. Elles ne s’abreuvaient que de conseils obsolètes et insipides afin de se rehausser elles-mêmes. Elles désiraient la châtier pour lui faire expier leur propre faute, une faute qu’elle n’avait point commise.
Encore une course à bout de bras dans la montagne.
« Nous allons te bander les yeux, cette fois-là, affirmèrent-elles, avec perfidie et sournoiserie. »
Comme d’habitude, elle n’avait pas le droit dire non. Elle n’avait pas le droit de vivre sa vie, mais trouvait des subterfuges afin de supporter cette situation. Jouer le jeu des conventions sociales, faire plaisir à tout le monde et faire semblant de montrer ô combien elle était satisfaite de sa position. Comme si l’existence lui imposait de se faire sans cesse reprendre par des êtres de vertu inexistante.
Elle avait son amour qui préférait la laisser dans l’ombre et lui faire endurer les pires situations. Il se plaisait par un sadisme certain à la priver de nourriture alors qu’il était un nanti baignant dans l’argent depuis sa plus tendre jeunesse. De connivence avec le harem de ces filles de joie, il se plaisait à la rabaisser sans cesse. Il l’avait déjà fait avec ses chers faux amis et le fait de l’exclure d’une vie plus confortable faisait partie de ses desseins pour la mettre à bout. Pas de chance, elle était beaucoup plus forte que lui et que cette société sans vertu. Son plaisir sadique était sans fin. Il faisait exprès d’aller voir ses pires ennemis afin de la voir sans ressources. Sa vie était spartiate depuis des années, elle se plaisait cependant à garder la face. Soudain, elle lui proposa un petit tour dans le bois escarpé :
« -Ne veux-tu pas me voir souffrir encore ? Nous pouvons faire une promenade, lui proposa-t-elle.
-Pourquoi pas, quelle excellente initiative. Je pourrai ainsi mettre mon plan à exécution, le plaisir au summum de te voir ainsi, ajouta-t-il, en bon pervers qui soit.
-Je pourrai par la même occasion ajouter à ton plaisir celui de te laisser au royaume de ces filles sans vertu, poussa-t-elle à son paroxysme le côté malsain de l’être de ce cher Pangore.
-Éloignons-nous un peu, veux-tu, marmonna-t-il avec délectation. »
Il était comme tous les autres, incapable de donner la moindre attention ni le moindre argent. Sa seule personne l’intéressait, assumer ses responsabilités lui était impossible, il ne voyait Isidora que comme l’esquisse d’un objet prêt à satisfaire sa propre déchéance. Il n’arrivait point à avoir raison de la gente féminine. Isidora pensait que ces messieurs étaient comme lui : narcissiques, incapables de s’investir dans une vie normale et régulière à deux, ne pensant qu’à conserver leur argent pour eux. Encore mieux, les femmes devaient tout payer. Ils ne tenaient pas la route.
Chemin faisant par une pente plus que rude, il amassait sous chaque pas de petites pierres qu’il entendait grésiller sous ses semelles en se délectant de la souffrance d’Isidora. Grimpant sans boire ni manger afin de satisfaire les désirs déviants de cet animal puisqu’ elle n’en avait pas le choix. Il la regardait d’un air distrait quand soudain, une petite goutte fit son apparition.
« Dépêche-toi, maugréa-t-il. »
Isidora avait non seulement pressenti cet instant, mais aussi gardé avec circonspection ses visions pour elle. Gardant sous le sceau du secret cet immonde fléau, elle se plaisait à penser que l’eau du ciel la lavait de tout et qu’elle serait une promesse de fécondité prospère. L’absence des hommes lui faisait éprouver du dédain. Elle savait que Pangore avait peur de la pluie.
« Allez, avance, que cela ne se transforme pas en orage. »
Tout d’un coup, les éclairs firent leur apparition. Isidora pensa que cela était un signe du destin, elle se savait protégée par les éléments. Pangore ne l’était pas.
La foudre apparût en une nano-seconde et le transperça avec fougue de son intensité dévastatrice. Il succomba à ce paroxysme, inconscient. Il était temps. Il était grand temps de se libérer de ce poids. La pitié au coût de sa pauvre vie n’existait plus, elle avait eu trop de cœur et de gentillesse pour ces ingrats, pourris de vénalité et d’égoïsme. Il faisait exprès de la narguer en allant voir le harem de filles de joie qu’il abondait d’ailleurs de son argent. Elle se disait qu’elle aimerait enfin connaître l’insouciance d’une vie agréable et riche. S’emparant du premier objet tranchant qu’elle trouva, elle rompit la lourdeur de ces nœuds qui l’encerclait à ces troncs d’arbres. Elle s’enfuit en une poignée de scintillements de rosée. Elle le savait. Fuir à toute épreuve. Sans aucun retour dans l’enfer de la basse-cour. Jamais. Pour de vrai. Elle l’avait enfin planté. Son arbre de vie.
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