Ils sont là depuis 180 millions d'années, sous couvre-feu, attendant leur règne qui adviendra dans longtemps d'ici.
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L’ère des néctapodes

Autour de moi bouillonne la vie, depuis des millénaires. Nous sommes des milliards, entremêlés, respirant le soufre et l’arsenic dans une obscurité permanente. Nous grignotons la roche et parfois nous-mêmes dans une fournaise qu’aucune autre espèce ne supporterait. Nous mettons des centaines d’années à nous reproduire, et des millier d’années à mourir lentement. De quoi? Tout nous manque et pourtant la vie perdure nous condamnant à survivre.

Introduction au monde de l’absurde, que nous mettons tant d’énergie à éviter. Suivez les néctapodes…

 

La respiration

Le ciel est bleu depuis deux mois et demi exactement, à part quelques rares mouillettes météorologiques. Selon les statistiques de l’aéroport de Cointrin: de 17 926 629 vols en 2019, c’est-à-dire 49 114 vols par jour, nous sommes passés à 31 108 vols par jour, pour quatre mois. Pour le mois d’avril, nous en étions à 211 vols par jour.

Pas étonnant que le ciel ne soit pas zébré, pollué ou bruyant. Dans une région donnée, une méthode consiste à enregistrer la quantité de chants d’oiseaux différents pour en déterminer la biodiversité, la santé terrienne. Transposer cela à la quantité de vols d’avions que nous subissions pour inversement déterminer la piètre qualité de l’air. Et tout cela, à cause d’un petit néctapode invisible qui nous permet enfin de respirer. Sans parler de la baisse du trafic de voitures et de la circulation des trains.

L’ironie de l’histoire, c’est qu’il s’attaque à nos bronches, nos branches en quelque sorte. Et puis en regardant les nouvelles, mais pas trop, j’entends des foules en Amérique crier I can’t breathe… Pendant ce temps, le Nouveau Continent, envoie une fusée et ses astronautes dans l’espace où il est bien connu, nous ne pouvons pas respirer comme sur la Terre. Tout devient limpide, co-dépendant. Sacré néctapode!

 

Nous l’avons tant désiré

Rien ne va plus ou plutôt, rien n’allait plus. Dans les bistros j’entendais les anciens dire Il nous faudrait une bonne guerre. Affirmation douteuse de ceux qui ont survécu…  Ils n’ont pas spécifié quelle guerre, mais plusieurs dirigeants égotropes n’ont cessé de marteler: C’est la guerre! Mais ça, ils l’ont aussi dit pour le terrorisme.

– Grippe espagnol (c’était peut-être déjà un néctapode): 20 à 50 millions, mais peut-être 100 millions, ça dépend de la façon de compter.

– La deuxième guerre mondiale: 60 millions de morts en 6 ans, du 1er septembre 1939 au 2 septembre 1945. Toujours ce maudit mois de septembre…

– La pollution de l’air: Responsable de 9 millions de morts prématurées. Je connais les naissances prématurées, les morts préméditées… mais les morts prématurées me laissent songeur. Si on pouvait prévoir la mort, on saurait si elle est prématurée. Est-ce qu’on a déjà confiné les avions, les voitures et les usines pour prévenir ces décès?

– Tabagisme: 7 millions de morts par année, fumeurs passifs compris.

– Violence domestique: Impossible d’obtenir des chiffres clairs tant il y a de pourcentage, figures de style, définitions, pays… bref. Il suffit de lire que c’est la cause majeure de mortalité pour les femmes entre 16 et 44 ans, davantage que le cancer, la malaria et les accidents de la route. J’adore la balance des comparaisons.

– Accidents de la route: La route tue chaque jour dans le monde autant que sept accidents de gros avions. Gros avion = environ 660 passagers. Par extension, 1,35 millions de morts par année.  Je vous laisse vérifier. Figaro du 8 février 2020

– Covid-19: 372 752 décès dans le monde à ce jour (en baisse).

– En parlant de septembre, l’effondrement des tours du WTC à New-York ont fait 2 762 victimes, en comptant les sapeurs-pompiers, les policiers, les badauds à proximité,  les membres et passagers des avions détournés, ainsi que 10 terroristes. Une vraie guerre…

 

Il faudrait redéfinir le mot guerre.

Alors s’il fallait une « bonne guerre » nous en avons eu plusieurs et ce n’est pas le nombre de morts qui définit la guerre. C’est quoi? Une catastrophe naturelle, c’est aussi une guerre? Parce qu’on pourrait dire « Il faudrait une bonne catastrophe naturelle » pour assainir notre humanité. Au moins, si elle est naturelle, nous ne sommes pas responsables. Quand on fonce à 300 à l’heure et qu’un mur nous barre la route, c’est la faute du mur. Prenons un Wikidictionnaire: La guerre se définit comme un état de conflit armé entre plusieurs groupes politiques constitués, comme des États.

La bonne nouvelle est que nous ne sommes pas en guerre, même pas en raison du néctapode, pauvre bête. Peut-être qu’une guerre se définit par le degré de panique et d’angoisses qui nous saisit quand tout s’ecroule. Tout, ce sont nos croyances. La croyance qu’il suffit d’un seul néctapode pour que tout s’écroule, alors qu’il est arrivé sur la scène suite à la guerre que nous livrons à nous-mêmes, à la nature, à la beauté et à la bonté. La guerre, c’est nous.

 

 

 

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