Interdit de fumer

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Ma petite-fille m'oblige à regarder dans le rétroviseur. Elle veut tout savoir, tout comprendre et s'ancrer dans mes racines. Ce journal s'écrit dans un ordre chrono-illlogique. Voir Sans histoire 1, suivi de Sans histoire 2... etc. Douze chapitres de mémoires à la carte, en cours d'écriture.
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Continuons nos discussions qui n’appartiennent pas à la grande histoire, mais à la petite. La mienne, la tienne et celles à venir. C’est un bon moyen de cheminer ensemble.

Mon grand-père sentait le cigare suisse Villiger, mon père le cigare cubain, mon mari le tabac à pipe russe et mon frère la cigarette américaine puis la vapoteuse électronique à l’odeur de chewing-gum. Parfois je croise un homme qui sent une fumée familière et cela me rappelle mon enfance. Pour toi, ce territoire n’existe pas, car plus personne ne fume à la maison, ni dans les cafés. Quel odeur ont les hommes aujourd’hui?

Côté femmes, seule ma mère fumait des kilomètres de cigarettes, mais curieusement, je l’associais à des parfums prestigieux qui ne venait pas de son addiction. Ses amies toraillaient dans un concert de gestes élégants qui ponctuaient leur conversations et leurs rires. Pas du genre « tisanes ». C’était mal vu de ne pas fumer, comme un refus de la société.

Enfants, nous volions les cigarettes et les cigares pour braver l’interdit en se cachant. Sans grande conviction. Juste le plaisir de profaner un tabou. Il y en avait tant que cela remplissait nos heures libres et faisait monter l’adrénaline. Que fais-tu pour désobéir?

Nous avons eu une grande discussion sur la triche et le mensonge. Cela a commencé avec les règles d’un jeu. On convient d’obéir aux règles, mais si on triche, ce n’est plus du jeu. Est-ce que mentir et tricher, c’est pareil?

A mon époque, il était mal vu de ne pas fumer et aujourd’hui il est interdit de fumer. Que ce soit bon ou mauvais pour la santé, ce n’est pas l’enjeu. Ce qui est bon, c’est de se conformer à la majorité. Et parfois la majorité fait n’importe quoi. Tu dois régulièrement choisir si, oui ou non, tu veux te conformer à la société.

Le repas terminé, tu m’as demandé si tu pouvais rejoindre une camarade de classe dans le parc juste avant d’aller à l’école au lieu que je te raccompagne. C’est une première. Le vent de la liberté commence à souffler. Que tes ailes puissent continuer à prendre le large. C’est le vent qui doit t’accompagner.

Pour commencer à Sans histoire 1

 

 

Soleil en toutes saisons

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Acacia, marronnier, sureau… le mois de mai fait la part belle aux fleurs blanches en grappes si possibles. Comme pour augmenter la diffusion des parfums et des rencontres reproductives. Durant toute mon enfance et adolescence, il n’y avait qu’une saison, celle du soleil. Epinglé chaque jour à son ciel bleu avant de laisser la place à la Voie Lactée dans la  nuit. Il y avait deux saisons, le soleil ou la pluie torrentielle. J’ai grandi sous le ciel des tropiques autour du monde. Une fois j’ai demandé à une américaine européenne ce qui lui manquait le plus sous nos latitudes et sa réponse, stupéfiante pour moi, fût: les saisons.

Je ne comprenais pas du tout ce que cela pouvait représenter. Y avait-il autre chose que le soleil? A l’âge adulte où j’ai finalement intégré le coeur de l’Europe, la Suisse, j’ai lentement compris mais il a fallut de nombreuses années pour que je remarque toutes les conversations autour de la météo. Cette interrogation quotidienne ne faisait vraiment pas partie de mes préoccupations. Sur les îles, nous parlions du vent. Le vent qui donnait sa forme à la mer ou à l’océan. L’année se fractionnait en invasions de toutes sortes: les cafards, les crabes et les moustiques, les migrations de crevettes, la proliférations des méduses ou la ponte des tortues.  Mais le temps qu’il faisait. Jamais. Lorsqu’une pluie tropicale nous tombait dessus, les gens sortaient pour danser de joie. Une vraie libération.

Il y avait l’arrivée des paquebots de touristes. Surtout le France dont l’exotisme nous comblait: nourriture française, films français, boutiques de mode française… ma mère dans une excitation folle nous emmenait et nous laissait totalement libre d’explorer ce château marin. Elle disparaissait quelque part entre les boutiques, les restaurants et le coiffeur.

 

Gardez le soleil en vous toute l’année, comme dans les tropiques

 

Commentaires (2)

Yo-Xarek
17.05.2025

Et bien oui, moi je fume aussi et je me fiche des conventions, de ce qui ce fait ou pas du moment que je n'importune personne. Mon oncle fumait des cigares Rössli, mon autre oncle des Gitanes, papier maïs, ma tante des Mary Long ou des Brunettes. Je me souviens de mes années de cours où nous allions dans les toilettes des filles pour fumer pendant la pause. Filles et garçons, nous étions assis par terre et refaisions le monde.

Starben Case
17.05.2025

Merci Yo-Xarek. Ca fait toujours plaisir de recevoir un commentaire. L'addiction à l'écran a remplacé celle à la nicotine. Pour exister dans cette société, il faut exister sur la toile, dans les réseaux. C'est très bizarre ce qu'on nous impose, tous ces jugements qui séparent les bons des mauvais citoyens. Le plaisir est cadré! Quelles seront les bons souvenirs de la génération suivante..?

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